Le royaume des bêtes

Du sable, encore et toujours. La Yarqa* se rapprochait de la Forêt des Menos. Bien des rencontres avaient eu lieues, bien des corps avaient été dévoré... Mais, "elle" était encore là. Depuis quelques temps, il en perdait parfois la raison à la maintenir en place. C'était trop tôt, encore beaucoup trop tôt. Ce qui lui restait d'âme devait être préservé, il avait tellement peur de perdre ses souvenirs étranges, qui dansaient dans son esprit quand il étudiait les parfums. Advienne que pourra, c'était son propre enfer après tout.

Alors que l'orée de la forêt se dessinait à l'horizon, il sentit quelque chose dans l'air. Tournant la tête de droite à gauche, il s'avançait vers la source de son appréhension. Derrière des ruines, des mouvements et des grognements se faisaient de plus en plus entendre. Passant un oeil derrière un mur, Farasha vit une quinzaine de Hollows en train de se dévorer les uns et les autres. C'était une étrange communion de sang et de rage. Un frisson parcourut son échine, son instinct lui commandait de rentrer dans le jeu mais il s'en garda.

Scarifiant sa peau, il maintint ses pensées. Le sol semblait bouillir de plus en plus dans ce secteur. Le danger était présent de se faire détecter et ses petites pattes commencèrent à le faire s'écarter de cette étrange orgie. Il en voyait de plus en plus souvent. La présence de la forêt était certainement la raison. C'était ici que de nombreux Menos Grande prenaient existence. Une nouvelle évolution se préparait donc et ces quinze là étaient certainement les restes d'une lutte bien plus grande à la base. Il fallait des centaines d'Hollows s'entre-dévorant pour voir naître un Menos.

Ces créatures étaient stupides... Il ne voulait pas devenir ça. Est ce que cette faim de plus en plus forte était la raison de ce futur rite de passage ? Depuis ses diverses rencontres, il s'était fait une idée du mal qui le rongeait. Il avait alors compris pourquoi son Maître lui avait proposé des proies fortes et puissantes. Cependant, c'était aller dans cette direction, celle de se perdre dans un géant noir et débile.

Alors que l'orgie était à quelques mètres de lui maintenant, un souffle le fit sursauter. Il n'entendait plus rien, qu'est ce qui s'était passé ? Une présence menaçante était présente, certainement attiré par le bordel ambiant. Il se tourna lentement vers une ombre qui s'approchait.

- Nous sommes Farasha, nous ne voulons pas de problème.

C'était sorti naturellement, comme un sauf conduit pour sa propre survie.

* = Chenille en arabe

Dans la noirceur du Yermo, des flammes dansaient tandis que les corps tentaient de les fuir. En vain. Ils n’arrivaient pas à les éteindre. Quand bien même cela arrivait, la source ne manquerait pas de les rattraper. Un insecte fait de feu même, dont l’origine elle-même était un être bien supérieur à ses victimes. L’Arrancar, elle aussi, semblait danser. Sous sa véritable forme, elle s’amusait de ses victimes. Il n’était plus question de chasse. Il n’y avait pas de jeu, tout en étant joué à l’avance. Le prédateur qu’elle était était à un niveau qu’ils ne pouvaient que rêver d’atteindre.
En vérité, ils s’y employaient. Ou du moins ils tentaient. Leur malheur fut que leur festin se trouvait sur le chemin de la Sorcière. Elle qui respectait l’évolution plus que tout considérait qu’elle se méritait. Les faibles incapables de résister à ses sortilèges n’en étaient tout simplement pas dignes.
Bien sûr, rares étaient ceux ayant la puissance d’y survivre.

Déjà ne restaient que les cendres. Ce petit jeu, elle s’y adonnait régulièrement. La Bruja Carmesi foulait de nouveau le monde de ses pas, et elle se devait de le faire savoir, son histoire étant depuis longtemps oubliée dans les flots du temps. Mais une simple étincelle pouvait faire revivre un brasier dans les bonnes circonstances.
Il y en avait également un autre intérêt à cela. Le vent avait porté à ses oreilles une forme qui lui était jusque là inconnue, une évolution encore supérieure. De quoi raviver la flamme en elle et retourner en quête de cette nouvelle évolution. Elle n’espérait pas qu’un tel étalage soit suffisant pour y parvenir. Elle n’en connaissait même pas la méthode, doutant que les anciens festins puissent avoir un quelconque effet.
Mais cela lui permettait simplement de s’habituer de nouveau à cette apparence.

Sa tête se tourna alors dans une direction. Même sans yeux visibles, elle semblait fixer l’horizon. Mais, plus encore, elle l’avait ressenti. Un autre festin. Ces derniers étaient nombreux en ces lieux. Peut-être même plus que d’habitude. Elle était déjà en tenue, pourquoi se priver ?
A peine le mouvement initié, autre chose attira son attention. S’il était fréquent de ressentir de nombreuses présences lors d’un de ces repas, il était rare qu’une âme ne se tienne à distance. Terrifiée ? Attendant qu’il n’en reste plus qu’un pour s’occuper de ce dernier ? Ou bien un être bien différent ? La curiosité l’emportait et déjà elle s’élançait dans cette nouvelle direction.

En quelques instants, tel le prédateur qu’elle était, elle arrivait sur l’être. Un simple Hollow, une chenille qui visiblement correspondait plus à l’option de peur que d’attente. Ce réflexe de tenter de se défendre par les mots était presque triste au sein d’un royaume guidait par les instants. Comme si les pieds masqués par sa robe ne touchaient pas le sol, elle glissait sur le sable autour de ce qu’elle ne pouvait considérer comme plus que de la vermine.
Les doigts de sa main droite dansaient dans l’air, générant un nouveau papillon flottant au-dessus de celle-ci, comme attendant d’être mis à son tour en mouvement.

>> Petite chenille serait-elle perdue ? Aurait-elle peur de se joindre à ce banquet ? Ou bien est-ce la faiblesse qui l’en empêche ?

Tel le chasseur jouant avec sa proie, elle pourrait fondre à tout instant sur elle. Cela ne durerait qu’un seul instant. Mais à dire vrai, cette chenille avait de la chance. Cette volonté de passer par la discussion et non par les instincts, pouvant être signe de faiblesse, passait pour elle comme une possible preuve d’intellect, de potentiel. Et ainsi donc la curiosité l’emportait et lui offrait une chance.

Bruja Carmesi:

La Bruja Carmesi était arrivée dans un souffle de feu. La Yarqa ne fut pas apeurée. Sa prudence lui avait permis de toujours survivre mais là, non, pas la peur mais plutôt une curiosité étrange. Elle l'avait saisie comme un parfum similaire au sien, il avait du mal encore à comprendre mais c'est ce que cette créature de feu lui intimait au plus profond de lui même.

Son regard se porta ensuite sur ce qu'elle venait de créer. Un papillon. Farasha voyait là de ces papillons pharaon qui illuminaient les mers, peu de temps avant de mourir. Était elle une de ses héritières ? Sa tête se tourna alors sur la Vasto Lorde qui tournoyait autour de lui, tel un chat s'amusant de sa proie à venir. La prudence avait toujours été sa conseillère et sa survie, il fit une grande révérence avant de répondre.

- Nous ne sommes pas perdue, nous rejoignons notre Forêt. Il posa un silence et observait le papillon de feu. Nous n'attendions rien de ce festin. Il n'y avait aucune beauté dans celui-ci, la beauté n'existait pas ici. Le sang était beau mais le parfum qui se dégageait d'eux était sans saveur.

Au contraire de cette créature ! Pour l'instant, Farasha restait très prudent. Etre brûlé vif ne faisait pas partie de ses objectifs à court, moyen ou long terme. Si cette Puissance avait décidé de l'abattre, cela aurait été fait. "Le sable appelait le sable", il s'était approprié cette maxime après sa rencontre avec Vaccio.

- Si vous nous permettez une question... Ce papillon, il nous fait penser aux grands Pharaons... En est ce un ? Nous n'avons vu que des images quand nous étions dans le monde humain. Votre art est agréable à regarder, même s'il est une flèche potentielle afin d'abattre votre proie. Nous connaissons notre place, Excellence !

La soumission. Cette façon de faire lui avait permis de survivre, de s'extirper de la voracité des Puissances de ce monde du vide. Il n'avait qu'un Maître mais il gardait le change en attendant d'apparaître à la lumière. En attendant, il n'était rien. Quand on était peu de choses, on n'inquiétait personne après tout, non ?

>> Ah, la faiblesse donc.

Conclusion logique en son sens. L’appel de l’évolution était tout ce qu’espérait la vermine présente au sein de ce monde. Encore plus lorsque l’on était situé tout en bas de l’échelle, comme la chenille face à elle. D’instinct, se joindre au banquet serait la réaction logique. Tous auraient agi ainsi. Sauf ceux se sachant incapables de se frayer une place, de survivre sans, à leur tour, se faire dévorer.
Bien sûr, il était possible de se présenter des excuses. Le parfum était cependant une nouveauté. Tout comme le fait que la créature ne la craignait point. Les bêtes tremblaient face à leur prédateur, face à ceux qu’elles savaient plus haut qu’eux dans la chaîne alimentaire. Même si dévorer n’était plus leur quotidien, les Vasto Lorde n’étaient rien d’autre que des dieux face à de simple Hollow.
Elle arrêta alors son mouvement, faisant face à l’être, le papillon toujours au-dessus de sa main.

>> Je n’ai jamais vu de misérable aussi curieux ceci dit. Je ne sais ce que sont ces papillons dont tu parles, le monde humain n’ayant guère d’intérêt. Ceux-ci sont nommés Mariposa Infernal !

Au-dessus de mon autre main, un deuxième insecte de feu se matérialise et, accompagné de celui déjà présent, se met à virevolter autour de moins tandis que j’affiche un large sourire légèrement carnassier. Simple forme, simple esbroufe de la part d’une Sorcière. Si dévorer cette chenille n’a jamais était mon intérêt, l’idée de la tuer comment à s’éloigner quelque peu.
D’un claquement de doigts, mes créations disparurent. Leur nom n’avait réellement de valeur, étant en partie un renvoi à la fois à leur nature, mais également à ceux utilisés par nos ennemis Shinigami. Simple ironie de ma part pour les quelques fois où j’avais pu en croiser.

De toute sa hauteur, la Sorcière Cramoisie surplombait son vis-à-vis. Mais plus pour longtemps. Son sourire s’étira un peu plus et, sans prévenir, de très nombreux papillons l’entourèrent, jusqu’à la masquer entièrement. Cette tornade autour d’elle dura un instant avant de se concentrer en un point précis, laissa apparaître de nouveau sa forme d’Arrancar tandis que les insectes devenaient une dague qu’elle rangea sans tarder à l’intérieur de sa cape.
L’intérêt était chose bien frivole en ce lieu et la blonde avait perdu toute volonté d’user de sa Resurrección pour intimer l’être du nom de Farasha. Non pas qu’elle n’en ait nullement besoin afin de dominer un être aussi bas.

>> Je dois avouer être surprise. La vermine est généralement trop terrifiée pour ne serait-ce qu’articuler face à ceux qui la domine. Dis-moi… Quelle est la raison d’une telle confiance ? Pourquoi ne crains-tu pas que je mette fin à ton immonde existence au point de ramper, au propre comme au figuré ?

C’en était presque frustrant, je devais bien l’avouer. Ce monde avait-il changé au point que les plus bas d’entre nous n’aient pu cette crainte viscérale au fond d’eux ? J’en serais presque déçue.

La faiblesse. Une arme autant qu'une protection. Farasha aimait s'en parer afin d'être une ombre insignifiante au milieu des Puissants. Il écoutait juste. Il entendait. Sa vocation n'était pas de se hisser à la tête du Monde, son Roi était seul à pouvoir y parvenir. Encore une fois, cette Puissance ne faisait pas exception.

Elle se sentait supérieure aux autres, dominatrice envers les plus faibles. Cette loi immuable de la proie et du chasseur, la Yarqa ne pouvait s'y opposer et l'avait accepter par bien des aspects. Être "Misérable" était son choix après tout. Toutefois, il se demandait pourquoi une telle chasseresse venait ici. Il n'y avait rien pour exciter son envie et encore moins ses ambitions. Les Puissances aimaient dominer les autres et se battaient pour s'imposer. La Yarqa était amusée de cette perte de temps.

Alors qu'Aviela faisait naître à nouveau un papillon de flamme, ses yeux violacés observaient les flammes autour de la belle femme. "Mariposa Infernal". Il notait cette information dans un coin de son esprit. Pour une fois, ce n'était pas sa faim qui tentait de lui dévorer son esprit. C'était sa curiosité... Que deviendrait il une fois évolué ? La Chenille n'avait aucune réponse et elle n'aimait pas cela.

- Nous sommes une vermine, nous avons accepté cette condition. Mais nous avons une chose que mes congénères n'ont pas, l'Empathie. Est ce un trait de notre pouvoir ? Nous savons, c'est tout. N'être rien est donc la seule évidence face aux Puissances du Monde du Vide, ce que vous êtes votre altesse.

Une révérence suivit, tel un chef d'orchestre après la représentation de ses musiciens. Il l'avait fait sans vraiment réfléchir, c'était comme le souvenir du passé. Son corps laid et bedonnant avait réagi comme si c'était déjà arrivé. Encore un souvenir, fugace. Cela l'énervait et ce n'était pas le moment.

- Si vous deviez nous détruire, vous l'auriez fait. Nous ne sommes rien après tout.... Prenant quelques secondes. Nous avons développé une science ancienne qui permet de ressentir des émotions enfouies dans ce monde, le Parfum. Nous aimons en fumer avec cet objet qui nous accompagne. Voudriez vous essayé ?

Son narguilé était à ses côtés et il le sortit pour le montrer. Des petits fumerolles s'en échappaient déjà, réagissant au Reiatsu de son créateur. Pour l'instant, il ne tendait pas la pipe. En effet, il ne voulait pas la forcer à sentir les imprégnations qu'il avait collecté depuis cinquante longues années. Enfin, cette femme aux papillons l'intriguaient... C'était la raison pour laquelle il venait de briser un tabou qu'il s'était toujours imposé, seul lui pouvait fumer. Là, il ne savait pas pourquoi mais l'avait proposé.

En accord avec sa nature, la larve s’écrasait devant celle qui la dominait de toute sa majesté. Cela lui rappelait presque les imbéciles qui, de trop nombreuses années auparavant, se couchaient devant celui qu’ils considéraient comme leur Dieu. La Sorcière avait été obligée de jouer le jeu à sa façon, mais jamais elle n’avait fait preuve d’aussi peu d’estime de soi. La faiblesse n’était pas excuse à tout et un tel manque d’estime de soi n’était que preuve d’une absence de valeur des plus complètes.
Face au rampant, elle ne savait en vérité que penser exactement. Son attitude était presque trop marquée. Se voyait-elle véritablement aussi misérable ? Au bien s’agissait-il de sa simple façon de tenter de survivre ? Faire en sorte que nul ne s’intéresse à lui.

Dans le dernier cas, il fallait bien reconnaître que cela semblait fonctionner. Même en plein doute, toute notion de chasse, toute possible envie de meurtre, avait véritablement disparu. A l’issue de cette conversation, les deux individus partiraient certainement chacun de leur côté et ne se croiseraient plus jamais, la Vasto Lorde laissant le soin à un autre miséreux de mettre fin à cette piètre existence.
Et, en vérité, il était quelque peu étrange que cela ne se fasse dans l’immédiat. Quel intérêt avait-elle à laisser durer la chose ? Elle ne voyait qu’un vulgaire Hollow, faible et lâche, pourtant elle daignait lui parler. La raison, bien que ne lui apparaissait qu’à cet instant, était plutôt simple.
Il en était tout simplement capable.

Nombreux de ses congénères n’étaient que des buts animés par leurs plus simples instants. Lui avait une réflexion plus poussée. Il s’en rendait même compte. Il se trompait simplement sur l’origine en un sens.
La larve n’en était peut-être pas véritablement une.

>> Je ne saurais dire pour l’empathie dont tu parles. Ce que tu démontres est une simple conscience. De ta place, de ce qui t’entoure. Et, en ce cela, tu surpasses possiblement tes congénères. Notre discussion est la preuve que l’instinct animal n’est pas la seule chose te guidant. Cela te donne-t-il une quelconque valeur ? Pas forcément. Simplement, le potentiel d’en avoir une.

Son œil glissa sur l’instrument que la chenille lui présenta. Certainement encore une référence au monde des humains. Entre les papillons et cela, ces derniers semblaient grandement l’intéresser, et pas simplement comme source de nourriture.
Elle déjà n’avait plus d’intérêt pour eux. Pour peu qu’elle en ait déjà eu, ce qui n’était pas garanti. Ils ne lui apportaient, sa faim d’âme ayant été depuis bien longtemps dépassée. Et sa dernière excursion dans leur monde n’ayant guère été des plus plaisantes.

>> Me vois-tu vraiment m’abaisser à cela ? Pour un peu et je pourrai croire que tu cherches à m’empoisonner afin de me dévorer. Il est certain que je serais bien plus appétissante que tout ce que tu pourrais trouver ici.

Cette créature était-elle aussi fourbe que cela ? Je n’en serais pas spécialement surprise. Cette tentative me semblait simplement bien trop maladroite. Avait-elle déjà fonctionné face à d’autres êtres ? Je n’osais y croire et, en cela, je doutais qu’il s’agisse bien de son intention.
Cela allait-il faire que j’accepterai cette proposition ? Bien sûr que non, je n’en voyais pas l’intérêt. Je me contentais de sourire, restant dans la lancée de mes paroles précédentes.

>> Finalement, peut-être ferai-je mieux d’en effet t’éliminer. Dans le doute...

Le refus. Elle avait peur et avait répondu par la menace. C'était là le comportement inhérent aux Puissances du Monde vide. Derrière son masque, un sourire aurait pu se dessiner face à cette réaction identique aux autres. Effrayée ? Apeurée ? Non, la Yarqa ne l'était pas. La prudence était sa seule arme face à Aviela, comme ce l'était pour tous les autres.

- Être conscient de ce que l'on est... est déjà une chose précieuse. On ne peut compter la valeur d'une personne sur sa forme ou ce que l'on ressent d'elle, nous sommes tous issus du Rien et le Rien nous rappellera quand il estimera que c'est nécessaire.

La réponse fut teintée d'une profonde mélancolie. Comment voir les choses autrement ? Bien des Puissances oubliaient d'où elles venaient et où elles finiraient. Tous ces grains de sable à leurs pieds en étaient la preuve absolue. Cependant, en faire état n'était pas une bonne idée, vraiment pas.

- Vous empoisonner ? Nous n'avons pas cette prétention. Les Puissances telles que vous n'ont pas à craindre les pouvoirs de la Yarqa. Et nous avions faim, nous aurions profité du repas qui s'est passé derrière ces murs.

La faim le tiraillait comme un démon. Farasha la sentait comme une force qui voulait l'amener sur un chemin interdit. Dans un sens, la dame aux papillons de feu était dans le vrai. N'importe quel Hollow aurait tenté une entreprise de la sorte si il en avait eu la possibilité. Mais... pas lui. Farasha était un serviteur fidèle, la tour d'ivoire de son Ô Roi. Il ne comptait pas s'abaisser à agir comme les "faibles" de ce monde.

- Pourquoi nous éliminer ? Une Puissance n'a pas besoin de cela, elle n'a plus faim. Des combats plus honorables vous attendent, pourquoi se préoccuper du sable de quartz sur lequel vous marchez ? Il en est de même de nous, les Hollows, nous ne sommes que des grains de sable pour vous. Nous ne vous voyons pas vous abaisser à cela.

Poser les bases d'une conversation à la place du combat, poser le silence plutôt que le hululement de la colère et de la rage. Tout cela était le mieux. Farasha aimait le silence car il était le prélude de son art. Il se gardait bien de le dire mais son esprit vagabondait d'une musique à une autre en entendant les paroles de la dame aux Papillons.

- Nous espérons vous avoir rassurer quand à nos intentions, acceptez vous donc notre offre ? A moins qu'un grain de sable ne vous effraie ?

La question était malicieuse. Si elle refusait, elle acceptait la prédominance de Farasha (et peut être de le détruire dans la foulée). Si elle acceptait, elle considérait Farasha comme il devait l'être et en cela elle aurait eu raison.

>> Me… Rassurer ?

Un instant de silence, un léger flottement suite à ces paroles. Puis un réel éclat de rire. Non pas moqueur, non pas méprisant. Pourtant, il y aurait eu de quoi. Non, tout simplement un rire amusé. La simple idée que cette vermine puisse penser qu’il était nécessaire de rassurer la concernée était de toute évidence des plus improbables.
Pour être rassurée, il fallait avoir peur. Bien souvent, la peur provenait d’un sentiment de danger pour sa vie. Du moins pour leur espèce, la survie étant l’un des principaux moteurs d’existence dans un monde aussi vide.
Ainsi, par ce simplement cheminement logique, il était possible de supposer que la créature envisageait donc d’être une source de crainte pour un être bien supérieur à elle.

Etait-ce ma remarque ? Cette chose avait-elle réellement pris au sérieux une simple phrase glissée avec un brin d’humour ? Je ne pouvais m’empêcher de penser qu’elle devait être au final bien limitée, à la hauteur de ses congénères, pour ne pas avoir perçu mon sérieux. Ou bien avait-elle une trop importante estime d’elle-même.
Dans tous les cas, bien qu’il dura quelques instants, mon rire finit par s’estomper, laissant de nouveau place au silence. Et, de mon seul œil visible, il était possible de percevoir sans nul doute que l’heure de la légèreté était terminée ?

>> N’oublie pas où est ta place. Peut-être ai-je fait l’erreur de penser que tu pouvais percevoir l’humour, mais un primitif tel que toi ne semble pas en être capable. Quand bien même tu chercherais à m’empoisonner, les chances que cela ne fonctionne sont inexistantes. Il n’y avait nulle crainte en mon être, et donc nul besoin d’être rassurée. Le jour où tu seras source d’effroi pour moi est bien loin d’être arrivé.

D’abord l’amusement, puis le mépris, maintenant l’agacement.
Le palmarès de la chenille était bien d’avoir été capable de générer plusieurs réactions de la part de la Sorcière. Toutes balayant le semblant de reconnaissance qui aurait pu commencer à naître. Après avoir réussi à surprendre de la bonne façon, voilà que ce Hollow de bas étage se sabordait sans perdre de temps.
Même si Aviela était bien consciente d’avoir un jour été elle aussi un simple Hollow, elle ne pouvait se dire avoir été aussi idiote. Ceux ayant le potentiel d’atteindre le sommet de la chaîne alimentaire ne pouvaient se rabaisser à de telles choses.

>> Mon refus était simplement motivé d’une absence complète d’intérêt pour cette chose, rien de plus. Tu me demandais pourquoi t’éliminer ? Car la vermine ne fait que diminuer la valeur des nôtres. La quantité ne peut primer sur la qualité et ceux incapables de prouver leur valeur ne méritent tout simplement pas d’exister.

De nouveau, une pression se fit ressentir. Pas de libération de sa véritable forme cette fois. Il n’y avait pas de véritable envie de devenir agressive. Sauf si, bien entendu, elle la poussait à agir ainsi.

>> Est-ce l’heure d’être rappelé ou bien considères-tu que ton existence mérite d’être préservée ?