6 ans.... enfin la 4ème !

Les jardins de la quatrième division. Un lieu dans lequel j’apprécie particulièrement de me retrouver. Ici, ce faux silence est roi. La brise transporte des odeurs délicates de fleurs et de fraîcheur, le clapotis de l’eau s’accompagne du claquement apaisant du shishi odoshi qui résonne dans les alentours, rythmant mes pensées et mon avancée. Il n’est pas rare que je m’installe au cœur des jardins dans le kiosque de bois pour y travailler. L’endroit est idéal pour cela. Portant ma tasse à mes lèvres, mon regard continue sa lecture du rapport qui m’a été donné. Celui-ci en particulier parle des avancées qui ont été réalisées avec les membres de la division scientifique. Il faut que je trouve un moment pour m’y rendre, et c’est fort de cette idée que je viens récupérer mon emploi du temps pour les prochaines semaines. Un agenda déjà fort chargé, et c’est avec un rien de regret que j’abandonne une garde pour me rendre auprès de mon équipe scientifique. Le rôle de capitaine est parfois lourd à porter, et je m’attriste un instant sur le temps que j’accorde aux soins des patients qui se réduit à peau de chagrin.

Mon regard s’échappe un instant, me plongeant dans quelques réflexions. Il faudrait que je vois avec Kanō pour qu’il me remplace pour certaines tâches, cela me permettra de me dégager un peu plus de temps pour m’occuper des patients et de l’apprentissage de nos jeunes pousses. Mon sourire s’épanouit de nouveau sur mes lèvres à cette pensée et je reprends ma tâche, satisfait. En tant que Vice Capitaine, c’est aussi son rôle aujourd’hui.

Reprenant ma tâche, mon attention finit par se faire troubler par une arrivée. Mes prunelles améthystes se tournent vers ce nouveau venu, et il me faut une poignée de seconde pour me rappeler de qui il s’agit. Il faut dire qu’il est bien rare de l'apercevoir au seireitei. « Oh. Si ce n’est pas une surprise. Je ne m’attendais pas à vous voir aujourd’hui. » A dire vrai, je ne m’attendais pas à le voir tout court. Aurais je raté sa missive ? Mes pensées se perdent un instant pour essayer de me souvenir de quelque chose le concernant, hélas rien ne me vient sur l’instant. Tant pis.

« Ne restez pas debout, asseyez vous, je vous en prie. » Je rassemble les documents que je consultais, prenant soin de ne pas les mélanger en les posant de mon côté pour dégager la table basse sur laquelle je travaillais. « Ça fait longtemps qu’on ne vous a pas vu… depuis mon intronisation je crois. En tout cas, c’est une bonne nouvelle que vous m’apportez là. Vous allez pouvoir m’en parler directement. » Ce sera toujours plus appréciable et interactif que dans un rapport papier. Ceux là même que je consultais avant son arrivée. Me redressant, je viens demander à la shinigami en poste de bien vouloir me ramener une tasse de thé pour mon troisième siège, ce qu’elle fait sans rechigner. Je viens me rassoir face à lui, mes lippes ourlées dans un sourire tranquille. « Je vous écoutes, tout c'est bien passé ? »

Mon sourire demeure sur mes lèvres lorsque le troisième siège s’assoit face à moi alors que la nostalgie le gagne. A la mention de l’une de mes prédécesseurs, mon sourire se fait plus nostalgique et je ne peux empêcher mes propres pensées de dériver vers cet ailleurs aujourd’hui inaccessible. Elle fut également celle qui m’avait accueillie au sein de la quatrième, il y a maintenant bien des années. Des centaines d’années même. Mon sourire se fait plus présent lorsque la shinigami fait son office, avant de s’échapper aussi vite qu’elle n’est venue. « Il n’y a rien de grave, au contraire, il s’agit même d’une bonne nouvelle que vous apportez. » Et je n’étais nullement sur des sujets qui nécessitaient que je ne sois pas dérangés… Sans cela, troisième siège ou pas, il n’aurait pu venir jusqu’ici.

Mes paupières s’éteignent un instant avant que je ne vienne moi-même porter ma propre tasse à mes lèvres. « Vous aviez votre propre mission, que vous avez remplie aujourd’hui avec brio semble t-il. Vous n’avez pas à vous excuser de vous y être consacré. » Un sourire ourle mes lippes, un rien amusé alors que je reprends. « Vous allez devoir vous ré-acclimater à notre monde, je le crains. » En parlant de monde, je parle bien entendu du Seireitei dans lequel le Keshinohana n’a guère remis les pieds depuis bien longtemps. A vrai dire, moi même je ne le connais pas vraiment, si ce n’est au travers de quelques rapports et de ces rares fois où il avait laissé sa mission de côté pour revenir au gotei 13 - comme lors de mon intronisation. Même à l’époque, j’avais préféré qu’il continue ce pour quoi il avait été missionné plutôt que de venir m’épauler.

Attentif, mon regard se tourne vers la serviette en cuir qu’il me présente, l’ouvrant pour me montrer son invention. Intrigué, j’observe ces pansements avant de les examiner plus minutieusement. La forme, la texture, la matière utilisée… « Ça semble en effet être un très bon atout pour nos troupes. » Surtout celle étant sur le terrain, n’ayant ni les connaissances, ni même le temps de pouvoir se régénérer… « Si vous me permettez. » Je dépose le pansement que j’examinais devant moi avant de saisir la garde de mon Zanpakutō à ma hanche avant d’entailler le dessus de ma main à l’aide de la lame. La blessure est suffisamment profonde pour que le sang perle immédiatement, et je prends le temps de ranger Fukuhana - dont la voix résonne dans ma tête au même instant - avant de placer le pansement sur la plaie suintante.

La douleur est présente mais j’examine le dessus de main, l’air un rien satisfait par le résultat. « En effet, c’est plutôt efficace ! » Je referme plusieurs fois mes doigts, vérifiant que le pansement ne bouge pas pendant mon mouvement avant de rajouter. « Vous avez pensé à rajouter un analgésique pour la douleur ? Je ne sais pas quelle méthode vous utilisez pour accélérer la régénération - car j’imagine que c’est cette méthode que vous utilisez ? - mais si on peut permettre d’endormir ne serait-ce qu'un peu la douleur, son efficacité n’en sera que meilleure. Mais pour cela il ne faut pas que les méthodes utilisées entrent en conflit. » Cela peut être le cas avec certaines d’entre elles… mais le but à dire vrai serait de le permettre.

Un sourire ourle mes lèvres, satisfait alors que mon troisième siège approuve mon amélioration. Ce dernier demeure sur mes lippes même à la fin de sa prise de parole, quand bien même celle ci dénote quelque peu avec le reste. Un homme franc. Je viens porter la tasse à mon visage, humant un instant le breuvage avant d’en glisser une gorgée sur mon palais. Je le savoure tranquillement, guère outré par ses mots. « Vous avez le droit d’avoir vos convictions et avis. Nul besoin d’en être désolé. » Il n’est pas nécessaire que nous ayons les mêmes cela dit. Mon regard se tourne sur le pansement sur ma main, l’observant un instant. Il s’agit d’une bonne invention, de celles qui peuvent modifier, si ce n’est drastiquement, au moins temporairement le cours d’une bataille. Un gain de temps non négligeable pour nous également. « Cela pourra être bien utile à nos troupes en attendant d’être pris en charge. C’est une bonne invention. Vous avez eu l’occasion de bien le tester j’imagine ? » Là où il était jusque là.

Un sourire un rien amusé glisse sur mes lèvres. Son malaise n’est pas justifié, néanmoins, il ne me connait pas, et l’inverse est tout aussi vrai. Autant palier à cela dès aujourd’hui. Ma mine se fait plus réflexive. « Oh, oui, c’est vrai que la dernière fois que vous êtes venu, le poste de vice capitaine était encore vacant.» A mon intronisation, cela n’avait pas vraiment été ma priorité. Mon regard s’échappe un instant, essayant sans forcément y parvenir de me souvenir si les deux hommes avaient pu se rencontrer auparavant. « Hum, je ne sais pas si vous l’aviez rencontré à l’époque, vous n’étiez pas resté très longtemps. Shimizu Kanō, ça vous dit quelque chose ? Cheveux noir, long, yeux gris, toujours très calme et souvent accompagné d’une flute ? » La description est approximative mais décrit plutôt bien le personnage et ses particularités. Il est comme l’eau d’une rivière, calme et apaisant mais dissimulant sous sa surface moulte remous invisible. Ma métaphore me fait sourire. Il est un bon complémentaire. « Il a été promu cette année. » Une précision qui sera peut-être utile. Ou non. J’ignore tous les ouïes dires qu’il a bien pu entendre en revenant au seireitei.

Que dire de plus sur la division ? Je réfléchis encore un instant. La promotion de Kanō est l’événement majeur de ces derniers mois pour la quatrième… ainsi que le retour du troisième siège.

« Hormis cet événement en particulier, et votre propre retour…» Mon sourire se fait d’autant plus amusé à ces mots. « Le reste suit son cours et chacun s’acquitte de ses missions. » Il y a d'autres choses évidemment. Toujours. Mais pour l’heure, autant le laisser arriver et constater de lui-même des potentiels changements qui a pu y avoir lieu. Un petit silence s’installe alors que mes pensées dérivent un instant. Nous ne nous connaissons pas. Un simple constat. Il est bien temps que j’en apprenne plus sur mon troisième siège. « Il y a une question que que je souhaiterais vous poser. » Une question qui, a dire vrai, m’intéressait souvent. Parfois, la réponse était évidente, presque naïve, des fois, particulièrement factuelle et pragmatique. Dans tous les cas, cette réponse en disait parfois plus que nulle autre. « Pour quelle raison êtes vous devenu médecin ? » Mon sourire est tranquille. Peut être ce pour une moi une manière de l’évaluer plus que de le connaître.

Qui sait.

Il ne le connait donc pas. Cela n’a probablement rien de surprenant mais j’acquiesce à ses paroles. « Et bien, il faudra prévoir une rencontre entre vous en ce cas. » En tant que troisième siège et vice-capitaine, ils allaient être amenés à travailler ensemble, alors autant prévoir cela dans les temps à venir. Et le plus tôt sera probablement le mieux par ailleurs. Il faudra que j’en échange avec Kanō.

Le Keshinohana ne se fait guère prier en ce qui concerne ma question. Serviteur des Tomoe. Ce nom amène à mon visage un rien de surprise. Alors comme cela, sa famille travaille pour le clan de la capitaine de la neuvième division… Un héritage transmis qui s’est transformé par la force des choses en quelque chose de plus. Un devoir que l’on apprécie d'endosser et de perpétrer. « Je vois. Votre père doit être fier du chemin que vous avez parcouru. » Je me doute, au vu de la manière dont il en parle, que ce dernier ne doit plus être - il ne parlerait pas sinon de sauvegarder son héritage j’imagine. « C’est un bel héritage qu’il vous a transmis. » Peut-être y a-t-il un rien de trouble dans mes prunelles à ses mots. Du trouble qui disparaît bien vite derrière mes paupières alors que je porte ma tasse à mes lèvres.

Peut-être n’est ce rien de plus qu’un mirage dans mon esprit. Ou dans le sien.

Mon sourire se fait plus franc lorsqu’il me retourne ma propre question, un léger pouffement venant s’échapper de mes lèvres. Suis-je surpris qu’il me la pose ? Peut-être. Et en même temps, il serait mal avisé de ma part de ne pas être aussi honnête qu’il a pu l’être avec moi. Néanmoins, je m’interroge un instant. Quelle version de mon histoire dois-je lui conter ? « Le destin, je dirais. » Cela signifie tout et rien. Reposant ma tasse face à moi, je prends quelques secondes à contempler les alentours cherchant les mots pour préciser davantage ma réponse, un sourire un rien nostalgique, peut-être même mélancolique glissant sur mes lippes. « Peut être est ce une sorte d’héritage aussi. » L’héritage d’une ancienne vie. « Enfin, pas forcément l’héritage d’un parent mais plutôt de ma propre âme. Lorsque je suis devenu shinigami, je n’avais pas cette clairvoyance cela dit, et cela a pris un peu de temps avant que cette voie ne se révèle à moi. Lorsque mon Zanpakutō s’est révélé à moi. » Mon sourire se fait plus franc. « Après, ça a été une évidence. » La voie que je voulais suivre.

Un sourire glisse sur mes lèvres emplies d’une nostalgie prégnante. « Pouvoir préserver la vie était quelque chose dont je ne pensais pas être capable à cette époque. Pourtant… je me retrouve ici aujourd’hui, à la tête de la division dont c’est là le rôle principal. » Un rire léger s’échappe de mes lèvres, amusé par ce fait alors que la nostalgie s’échappe au rythme de mon éclat. « Rien n’est immuable. Je trouve que c’est une bonne leçon. » Mon sourire ourle mes lippes. Doux.

« Vous êtes toujours au service des Tomoe aujourd'hui ? » Il n'y a nul appriori dans ma voix. Seul des questions simples pour entretenir le fil de la conversation. En apprendre plus sur celui qui est aujourd'hui face à moi.