For Queens

Cela fait quelques jours, désormais, que Yoru se prépare pour la petite excursion.

Lorsque la missive lui est parvenue, faisant la demande de l'attribution d'un membre du Kidōshū à l'expédition montée par les Capitaines des Troisième et Douzième divisions, elle a préféré s'occuper personnellement de l'affaire.

Les raisons sont multiples, mais la plus simple tient en quelques mots : elle se fait chier.

Rester dans un bureau pendant des plombes tous les jours, sans pouvoir voir un peu le terrain, est une routine qui a de quoi la rendre folle. Du coup, elle a sauté sur l'occasion : voilà un excellent prétexte pour s'aventurer sans trop de risques dans des territoires qu'elle n'a encore jamais pu voir personnellement. Une aubaine ! Le Hueco Mundo, ça sonne si exotique... Et on lui a vanté les dunes de sable qui s'y étendent à perte de vue. D'accord, elle sait qu'elle est censée y aller pour installer les machins de la Capitaine Yūko, mais on peut bien allier boulot et plaisir, non?

Du coup, elle a fourré tout ce qui pourrait être utile dans un large bagage en toile, type sac de sport : serviette de plage, crème solaire, et même un assortiment de bentô spécialement confectionnés pour l'occasion par les habituées de l'atelier cuisine, à l'Association des Femmes Shinigami. Les boîtes, faites en bambou, sont standardisées et contiennent toutes le même repas, à l'exception de l'une d'entre elles : ornée de stickers d'animaux et d'un petit post-it rose "Seii-chan ♡", elle ne contient rien d'autre qu'une colossale plâtrée de fraises coupées et agrémentées de chantilly (qui sont, paraît-il, le péché mignon de la Capitaine). Allez savoir où elles ont trouvé autant de ces fruits à cette période de l'année (peut-être le Shikai du Capitaine Shunshō peut-il en faire pousser?), mais cette petite attention, due à la surprenante popularité de Seiichi dans les rangs de l'Association, risque fort de se terminer en diarrhée explosive pour la concernée. À ses risques et périls lorsque viendra l'heure du casse-croûte, donc.

Arrivée sur place à l'heure dite (et, pour une fois, tirée à quatre épingles, à la seule exception de ses habituelles bottes compensées en cuir noir), Yoru reste coite pendant le petit briefing de la scientifique, ne laissant échapper qu'un sifflement strident lorsqu'elle cale le minuscule émetteur au creux de son oreille. Pratique, ce truc, et plus immédiat qu'un Tenteikura... mais avoir plusieurs solutions sur lesquelles se rabattre n'est jamais du luxe : après tout, la Nécromancienne se brisera bien moins facilement qu'une simple coque remplie de composants électroniques, en cas de grabuge.

Laissant son sac ballotter à son côté, elle emboîte le pas à Seiichi lorsque celle-ci s'introduit dans le portail désormais ouvert. La solennité de la chose ne fait que renforcer une atmosphère de gravité, que même son habituelle nonchalance ne peut venir entamer : au-delà de l'aspect ludique de ce petit voyage, elle sait que le risque de tomber sur des Arrancars, ennemis jurés de leur propre espèce, est réel. Non pas qu'elle s'en inquiète - il faudrait être fou pour attaquer de front leur petite congrégation, dont les deux tiers des membres se placent parmi les combattants les plus performants du Seireitei -, mais elle n'en a jamais vu par elle-même. Une donnée inconnue, donc, qui gardera ses sens alertes une fois sur place... même si elle trouve un petit moment pour se faire griller la couenne sur le sable chaud du Yermo, histoire de ne pas avoir mis un bikini sous son uniforme pour rien.

En silence, sans prêter attention aux tourbillons d'énergie se tortillant comme autant de menaçants serpents tout autour d'elle, elle s'affaire à concentrer le reishi sur le trajet à emprunter, prêtant ainsi main-forte à la Capitaine de la Douzième alors que tous s'enfoncent dans le tunnel entre les mondes.

Sa première mission importante en tant qu’agent de terrain du CRHEH. La Blanche est ravie bien sûr, elle a bien besoin d’un petit voyage et d’avoir l’impression de ne pas juste s’entraîner tout le temps. Cela étant, ça a payé puisqu’elle part avec la maîtrise d’un nouveau Kidō et, cerise sur le gâteau, son Bankai ! Personne ne sait, elle ne l’a encore dit à personne. Cela fait si peu de temps qu’elle n’en a pas eu l’occasion et puis, pas envie non plus à vrai dire. Cet affrontement avec Kokuouheika l’a fortement ébranlée et elle en a perdu ce sourire qu’elle arborait pourtant en permanence d’ordinaire. De toute façon, elle n’est pas là pour bronzer sur la plage mais pour veiller à apporter son soutien à son équipe en cas de rencontre indésirable qui tournerait mal.

La nuit a été mise à profit pour se reposer complètement, de quoi être en pleine forme lors du grand départ. Ses blessures ont terminé de cicatriser et l’on pourrait presque dire que d’apparence elle semble comme neuve.

Sur le lieu de rendez-vous, elle reconnaît le Capitaine de la douzième. Les deux autres lui sont complètement inconnus ou presque. Elle a déjà pu entendre brièvement parler de Yoru lorsqu’elle s’est inscrite à son association des femmes Shinigami, mais jusqu’à présent, à chacune de ses visites dans leurs locaux, elles n’ont fait que se louper. D’un signe de tête, Mizuki salue chacun puis prend l’oreillette qui lui est destinée. C’est admirable tout ce que la technologie de la Douzième peut faire. Elle est admirative. L’appareil prend place à son oreille sans qu’elle l’active.

Se tenir prête, toujours. Sa main agrippe la poignée de son katana prête à le sortir de son fourreau si besoin. C’est l’heure d’y aller. Le portail est ouvert et elle entre à la suite de ses compagnons de voyage.