Serizawa Miyu
Données Spirituelles
Grade: Six of Cups
Sam 15 Avr 2023 - 2:09 - Crache sur mes jeux et j'te ferai cracher tes dents pov' merde
Une usine désaffectée près du port saturée d’hommes d’affaires. Un spectacle on ne peut plus surprenant pour un témoin lambda. À se demander ce que les friqués de ce monde venaient faire dans un tel trou à rat. À cela, une vérité tapie. Lorsqu’un individu au sommet de la société en vient à éprouver l’ennui, lui apparaît l’opportunité de redescendre dans la fange comme spectateur d’une sauvagerie que l’on ne saurait retrouver dans les cocktails dînatoires qui dessinent son train de vie ordinaire. Est-ce à dire que n’importe qui peut arriver ici pour un peu qu’il s’enrichisse suffisamment ? Oh grand dieu non… Même parmi les requins, les places se font rares et chères. Un public trié sur le volet pour un loisir coupable : les combats clandestins.
Au milieu de la foule alors protégée par des barrières de fortunes s’opposaient deux combattants. Le premier, une vedette dans le milieu. Un gaillard de la vingtaine dont le regard transpirait l’assurance, les cheveux noirs ébouriffés, un simple short pour exposer derrière des muscles saillants. Le favori de cette compétition interdite qui faisait alors face à un autre habitué à l’aspect plus roublard approchant de la quarantaine. Les cheveux blonds coiffés en arrière sur le sommet du crâne. Un gaillard plus imposant au palmarès aussi impressionnant. Pourtant, ses statistiques de combat ne se démarquaient pas particulièrement parmi les professionnels de ce sport dangereux.
Moi ? Je comptais parmi la foule comme un membre de ce club ayant été intégré voilà quelques années déjà. Et du haut de ma réputation de flambeuse, je surprenais les organisateurs titulaires de n’avoir pas misé un seul billet dans ce combat. Pour cause, l’adversaire du champion, je le connaissais bien. Ça avait été le premier lascar à affronter un poulain que je fis entrer en scène, très prometteur. Et pour le soin que j’accordais à la sélection de mes combattants, je ressentis alors quelque chose de bizarre tandis que je démarrais ce jeu sous le sceau de la défaite. Non pas que j’étais mauvaise perdante. Pas à ce sport, du moins. Mais plutôt… mon gars du moment n’avait pas révélé la moitié de ses capacités.
Était-ce la pression ? Possiblement. Mais à bien observer les combats du représentant fétiche de cette racaille de Kuramoto Shunso, mon malaise tendait à se préciser. Il y avait anguille sous roche. Et cette fois, je venais avec la ferme intention de confirmer mes soupçons dans un match qui donnait le favori gagnant pour une côte à 20 contre 1. Un pari juteux pour Shunso que je connaissais comme un nouveau riche d’une société écran cachant, je le savais, des affaires dans le milieu criminel. Bref, le genre de type à éviter. Du moins, c’était partir du principe que j’étais raisonnable. Une connerie en clair !
Au sifflet de l’arbitre, la lutte s’engageait. Et aux premières minutes, les échanges apparaissaient on ne peut plus normaux. Osamu que l’on donnait alors gagnant brillait par ses techniques de redirection devant cette brute de Manzo qui ne comptait que sur sa force physique agrémentée de quelques mouvements d’arts martiaux basiques. Un type de la rue, en définitive, qui partait pour perdre. Mais voilà, une fois encore se produit ce que j’attendais. Une brusque perte de régime chez Osamu dont l’endurance était d’ordinaire incontestable.
La suite ? Des coups de l’autre dur à cuir qui désarçonnaient l’adversaire davantage qu’ils ne le devraient. Non pas que ce soit flagrant. Mais forte de mon expérience, les petits détails du genre ne m’échappaient pas. La conclusion ? Un KO dans les règles de l’art, de quoi couper le souffle des parieurs ayant misé sur le mauvais cheval. À côté, ce voyou de Shunso qui ne boudait pas son plaisir et n’hésitait pas à humilier l’autre dresseur de pokémon dans les règles de l’art. Un défaut ? Pas vraiment. En tout cas, pas lorsque la victoire était obtenue à la loyale.
Mon sentiment dans tout ça ? Une colère sourde. C’était la goutte. Ce qui me ferait approcher de l’un des organisateurs que j’avais identifié en arrivant. Un gars que je ne voyais pas souvent. Cela dit, lorsqu’il était présent, j’avais remarqué qu’il irradiait d’une aura d’autorité sur les autres arbitres de l’événement. Ici, il serait le meilleur interlocuteur pour la merde que j’allais déballer de son sac. Une merde que l’on n’attendrait pas au jugé de mon apparence. Soit, une jeune femme à la silhouette frêle, habillée d’un costume blanc très chic qui n’avait aucune raison de la rendre honteuse vis-à-vis des autres membres de ce club très sélect. Les cheveux longs à l’instar de rideau, j’aurais pu avoir un visage d’ange s’il n’y avait pas ce regard perçant venant se planter dans celui de ce type.
– Vous, là ! Je peux vous parler un moment ? J’aurais deux mots à vous dire en privé, si vous me le permettez.
Une petite politesse qui n’était là que pour la forme. Car dans mon ton, j’étais déterminée à confronter cet homme. M’accompagnait dans mon dos un garde du corps au teint basané, des lunettes de soleil, les habits classes. Une armoire à glace suffisant à en refroidir plus d’un, si d’aventure l’on venait me chercher des noises. Revenait-ce à trahir que je voulais faire de ce pauvre organisateur mon quatre heure ? Certes, j’étais vénère. Mais cette colère ne se dirigeait pas contre lui, comme le suggérait ce regard noir que j'orienta furtivement vers le grand gagnant de ce que j’estimais être une farce.