Y'a comme un problème !

- LA PUTAIN D'TA MERE !!!!

Le beuglement fut immédiatement suivi d'un grand fracas alors que quelques scientifiques quittaient la pièce. Mickael, apparemment très énervé, laissait la colère prendre le dessus et venait d'envoyer valser une partie du matériel face à lui. Depuis le retour de cette mission, quelque chose avait un peu changé en lui. Ce n'était évidemment pas lié à ce qui s'était passé avec les Arrancars mais réellement en lien à ce petit conflit qui l'avait opposé à Miyu.

Se faire battre n'avait pas été le problème principal. Certes, le bonhomme avait sa fierté mais ce n'était pas franchement le souci ici. Non, le véritable problème venait du comportement de cette femme. De cette folle, s'il pouvait se permettre de juger. Un tel comportement était à ses yeux inacceptables et il ne comprenait absolument pas pourquoi on laissait faire. Pourquoi Hanae n'avait pas réagi ? Pourquoi sa propre section ne faisait rien face à ce qui paraissait être "une catastrophe ambulante" ?

- Que des tarés ici. Tsss. Tu parles d'une organisation d'merde ouais. Même pas capable d'agir, bande de demeurés. Y'a même pas d'chef d'ailleurs. Des gros glandeurs !!!

Se laissant tomber sur une chaise à proximité, il poussa un long soupir consterné, alors qu'il fermait les yeux comme pour ne pas voir les dégâts qu'il avait lui-même fait.

- Fais chier. J'vais devoir tout nettoyer maintenant. J'suis quand même un gros con, moi aussi.

Il s'était redressé légèrement, constatant des dégâts. Rien d'irrémédiable mais il savait qu'il allait devoir s'excuser auprès des autres.

Un soupir s’échappe des lèvres du forgeron alors qu’il détaille l’étiquette de la large boîte qui trône fièrement sur son établi. Un nom qui n’est clairement pas le sien y est imprimé, indiquant par conséquent qu’il n’est pas le destinataire légitime de ce qu’il contient. Visiblement, sa forge était devenue, par il ne sait quel jeu du destin, la réception d’un dénommé Mickaël Diamond. Un nom qu’il connait, à défaut d’être le sien. Un scientifique qui appartient par conséquent à la même section que la sienne mais avec lequel il n’a que peu de lien. Il faut dire qu’ils ne travaillaient pas sur les mêmes sujets et n’ont pas la même expertise - pour ce qu’il en sait tout du moins. Le revenant demeure en ces lieux une exception, et le terme de scientifique n’est pas à proprement parlé celui qui lui correspond le plus. Contrairement à tous ses collègues.

Récupérant le carton intru entre ses mains, le forgeron s’échappe de son lieu de travail, décidé à rendre son dû à son destinataire légitime. Sa forge n’est pas un dépôt et il préfère autant livrer lui-même l’objet plutôt que d’être dérangé lorsque ce dernier apprendra qu’il se retrouve dans son domaine. Vêtu d’un hakama sombre et de son kimono au ton plus clair, l’homme dénote dans la section scientifique plus traditionnellement vêtu de leur blouse blanche ou de vêtements plus modernes. Ce qui ne semble nullement le troubler, habitué à certain regard bien qu’ils sont ici plus coutumier de cette excentricité. Après tout, il fait partie des anciens ici, dans cette organisation. Et c’est sans prendre en compte son statut de revenant.

Après quelques détours, le forgeron finit par atteindre son but, apercevant une envolée de scientifiques et de quelques jurons qui s’échappent dans le même temps du même lieu. Un fracas également, qui lui fait cesser un instant sa marche, un froncement de sourcil s’inscrivant sur son visage. Des rumeurs de conversations parlant d’un scientifique de mauvais poil et incluant le nom de ce destinataire perdu viennent effleurer ses oreilles. Donc… Il semblerait que l’humeur ne soit pas au beau fixe. Cela lui rappelle une autre humeur, et d’autres rumeurs.

Cet événement.

Un dernier soupir et le revenant s’avance pour rejoindre cette pièce que tant viennent de fuir. Il n’est pas arrivé si loin pour faire demi tour uniquement à cause d’une humeur maussade. Par ailleurs, il n’est pas là pour faire la discussion, alors... Poliment, le forgeron toque à la porte attendant quelques instants qu’on lui donne l’autorisation avant de se permettre de rentrer. D’un rapide coup d'œil, il constate les dégâts mais son regard s’arrête bien vite sur le dernier scientifique présent dans la pièce. Sa cible. Il s’incline légèrement dans un signe de politesse usuelle pour toute personne foulant la ville japonaise, gardant son expression habituellement neutre sur le visage. « Sieur Diamond. » Un titre peu utilisé en cette ère mais dont il est coutumier dans son cas. Il met en avant le paquet entre ses mains, le tendant à son interlocuteur. « Il semblerait que ce paquet vous appartienne. » Simplement.

Son regard se porta sur le nouvel arrivant. Katsuo. Une grimace apparut sur le visage de Diamond. S'il y a une chose qu'il n'aimait pas, c'était clairement les formules ampoulées du style "sieur". S'il appartenait à une autre époque, c'était pas son problème à lui. Les deux loustics se connaissaient un peu sans pour autant avoir de réelles choses en commun. Ils ne travaillaient quasiment jamais sur les mêmes sujets et lorsqu'ils se croisaient, cela s'arrêtait généralement aux formules de politesse. Enfin, surtout d'un côté quoi.

- Ils se sont encore plantés, ces abrutis.

Il observait le carton dans les mains du nouvel arrivant, avant de l'observer dans son intégralité lui aussi. Ils avaient au moins une chose en commun : ils n'étaient ni l'un ni l'autre des habitués des blouses et autres conneries du genre. En cela, ils dénotaient des autres collègues qu'ils avaient. S'approchant de l'homme, il attrapa le carton qu'il posa sur la petite table près de lui.

Qu'est-ce que cela pouvait bien être ? Pas énorme, pas spécialement lourd non plus. Curieux, il se souvenait pas d'avoir fait livrer un truc sur son lieu de travail. D'habitude, il faisait en sorte que ça arrive à la maison. S'apercevant qu'il n'avait pas été le mec le plus accueillant de la Terre, il se reprit.

- Excuse-moi, j'suis un peu à cran. Ces derniers temps, les journées de merde se sont comme qui dirait accumulées, si tu vois c'que j'veux dire. Comment tu vas, Katsuo ? Désolé de t'avoir fait te déplacer juste pour ce truc. D'ailleurs j'sais même pas ce qu... OH PUTAIN MAIS SI !!!

L'illumination. Alors qu'il s'apprêtait à dire qu'il ne savait pas ce que c'était, il se souvint d'une chose. Ce carton et ce qu'il contenait, il l'attendait depuis un moment. Quelle aubaine que ce soit enfin arrivée. Un large sourire apparut sur son visage alors qu'il s'approchait de la boîte, posant simplement le plat de sa main sur le dessus. Son regard se porta immédiatement vers le coursier.

- Tu veux que j'te dise, tu viens d'illuminer cette saloperie de journée. J'attendais ce truc depuis longtemps, j'espérais même plus le recevoir, j'te jure. T'as deux minutes pour causer ou t'es juste venu jouer les coursiers ?

Du pied, il tira une chaise afin de se poser dessus. Ils n'étaient pas spécialement proches ces deux-là mais sans doute aussi parce qu'ils n'avaient réellement jamais vraiment échangés. Leur nature était opposée. Leurs recherches aussi. Et même visuellement, on pouvait voir des différences majeurs entre eux, que ce soit comportementales que verbales. Pour autant, on n'était pas à deux minutes près si ?

- C'est vrai quoi. On cause pas des masses, toi et moi. Sans doute ma faute. J'ai tendance à dire que j'suis pas là pour me faire des potes mais juste pour taffer. Et en soit, c'est vrai hein. Mais merde. On fait partie de la même section quand même. A un moment, faut au moins faire un peu d'effort.

Une carte apparut entre ses mains. Il s'amusait à la faire passer entre ses doigts, la laissant glisser dans l'autre main sans même y réfléchir. Son regard s'arrêtant de temps en temps sur le carton, comme si l'envie de l'ouvrir maintenant était sa seule préoccupation.

Différent. A n’en point douter, les deux membres des cups le sont. Que ce soit dans leurs apparences ou dans leurs comportements, rien ne paraît plus dissemblables que leur deux natures. Ce qui ne semble que peu troubler le japonais qui demeure égale à son habitude. Une attitude neutre, un rien de retrait et de retenu alors que son interlocuteur récupère finalement l’objet qu’il lui tend après avoir laissé échapper une insulte pour les responsables de cette course imprévue. Il n’en semble pas bouleversé, là où le scientifique finit par s’excuser. Une excuse qu’il accepte d’un simple signe de tête, sans qu’il ne prenne davantage ombrage de ses mots.

Jusqu’à ce qu’une illumination ne se fasse, vraisemblablement dans l’esprit du cups, lui faisant hausser un sourcil de circonspection. « Et bien tant mieux j’imagine. Même si cela n’est pas vraiment de mon fait. » Après tout, il n’est pas vraiment responsable de cette livraison impromptue dans son atelier. Causer. Le terme ne lui est pas inconnu depuis le temps qu’il ère dans cette époque, néanmoins, cela lui fait réfléchir. Parler. Il est vrai qu’ils n’échangent que peu tous les deux, bien qu’en vérité pour Katsuo, cela n’a rien d’exceptionnel. Il n’est guère reconnu comme étant une personnalité sociable et ouverte, bien au contraire.

Alors non, ce n’est nullement de la faute du Diamond - tant est que cela pourrait être une faute. Le forgeron glisse ses mains dans les manches de son hakama, fermant un instant les yeux. « Nous avons une mentalité semblable sur ce point. » Non, le Shinken n’est pas en ces lieux pour se faire des amis, ni un grand bavard par ailleurs et ce, même par le passé. Il n’a jamais été très doué pour se lier aux autres. Quelques images viennent pourtant troubler ses pensées avant qu’il ne pose de nouveau ses prunelles d’ambre sur l’homme qui s’est assis. Son collègue. Un jour, ils seront peut être amenés à se battre côte à côte quand bien même n’est ce pas là l’objectif de leur section.

« J’imagine que je peux également faire un effort à ce sujet. » L’ombre d’un sourire ourle ses lèvres, fendant quelque peu son masque de neutralité. Son regard retombe sur les débris au sol. Il n’est guère coutumier de ce genre de désordre, dans sa forge, tout demeure à sa place, rangé très exactement à l’endroit qui lui est assigné. « Vous avez eu un problème dans le cadre de vos recherches ? » Demande t-il avec une certaine prudence. Il ignore si il s’agit là d’un sujet trop délicat pour être abordé, néanmoins, c’est le premier sujet qui semble l’avoir interpelé.

Vrai que c'était pas le plus bavard du groupe non plus. Mais Diamond ne s'offusquait généralement pas de ce genre de tempérament, surtout qu'il pouvait généralement parler pour deux. Pas forcément qu'il aime s'écouter parler mais à dire vrai, même dans son travail, il lui arrivait fréquemment de causer solo. Ou alors avec sa soeur. Même s'il évitait généralement de le faire devant témoin pour ne pas passer pour un malade mental. C'est qu'il était difficile d'expliquer à d'autres qu'il parlait au fantôme de sa soeur, fantôme que nul autre que lui voyait. Hallucination ? Possible. La raison n'avait ici aucune importance.

Alors qu'il jetait un oeil vers les débris, il haussa simplement les épaules. D'ordinaire, il faisait un peu plus gaffe que ça. Pas qu'il soit minutieux mais disons que comme tout scientifique, il était préférable d'avoir un espace de travail plus ou moins clean. Pour le coup, c'était plutôt lui qui avait merdé. Se grattant la barbe naissante, il reprit doucement :

- Nan. C'que tu vois là, c'est juste le résultat d'un p'tit coup de sang. J'me suis un peu énervé et j'ai tout envoyé péter. J'dois ramasser d'ailleurs.

Il fit le tour du bureau pour attraper une sorte de petit balai et une pelle. Se penchant vers le sol pour commencer à ramasser la merde qu'il avait foutu. Tout en pensant à Katsuo. Il ne connaissait vraiment pas grand chose du loustic à dire vrai. Côté privé, on était même dans le néant absolu. Pas mieux sur les projets "UN".

- Tu travailles sur quoi d'ailleurs en ce moment ? J'sais pas pour ta section mais nous, on est assez libre. Perso, j'pense aboutir sous peu à la création d'une petite folie mon pote. Un médoc qui boostera à mort nos chers soldats. J'peux te dire qu'avec ça, ils vont pouvoir se déchainer les loustics.

Restait à gommer quelques uns des effets secondaires mais il y travaillait. Il avait du temps pour cela, pas comme si sa vie était bien chargée. En dehors des femmes, du poker et du boulot, il ne foutait rien d'autre de ses journées après tout. Il finit par se relever après avoir terminé de ramasser les morceaux au sol.

- Ca m'servirait peut-être de leçon. Quel débile d'avoir piqué une colère comme ça sérieux. Comme ma soeur me disait à l'époque, "t'es vraiment une tête de con Mickael".

Il entendit le gloussement de cette dernière. Dans sa tête.

Un coup de sang. Cela reflète en effet plutôt bien ce que les murmures des scientifiques s’échappant avaient laissés présager. Ainsi que cette voix vociférante qui appartenait à l’homme qui lui fait à présent face. Bien sûr, nulle explication ne vint sur la raison même de cet énervement mais le forgeron n’insiste pas. Après tout, cela ne le regarde pas et il préfère éviter de malencontreuses indiscrétions mais il acquiesce d’un signe de tête pour prendre note de l’information, n’ayant visiblement rien de plus à y rajouter.

Le scientifique finit par s’occuper de la besogne, attrapant de quoi ramasser son incartade alors que Katsuo demeure égal à lui-même. Même si le Diamond avoue de lui-même qu’il n’est pas le genre d’homme à pousser les relations humaines dans le cadre de son travail, il n’en demeure pas moins plus volubile que ne l’est le Shinken. Ce qui n’est pas pour le déranger. Il est dans son cas tout son inverse, et cela lui rappelle sans mal ses propres interractions avec la jeune femme à l’allure fluette qu’il avait depuis lors croisé plusieurs fois en sein de l’organisation.

Des points communs qu’il garde pour lui.

Sa section. Lui aussi est plutôt libre dans le cadre de son travail, mais il n’a de scientifique que le titre qu’on lui a accolé. Dans lequel on l’a catégorisé dès son arrivée. Parce qu’il fallait bien trouver un endroit dans lequel il pourrait évoluer au vu de ses propres affinités. « Des drogues de combat ? » hasarde t-il en réponse aux paroles de son interlocuteur avec un léger - mais présent - froncement de sourcil. Est-il contre ce genre de procédé ou est-ce simplement une méconnaissance liée à son passé ? Difficile à dire tant les émotions sur son faciès demeurent subtiles. Presque imperceptible.

En ce qui le concernait cela dit, il lui est plus aisé de répondre sur ce domaine en particulier. Un domaine qui le passionne et pour lequel il n’y a nul secret à garder. Ici après tout, tout le monde sait ce qu’il fait. Tous ceux qui s’y intéressent cela dit. « Je suis forgeron alors je forge des armes capables de trancher les esprits. C’est mon unique travail ici. » Ses prunelles mordorées contemplent les installations présentes dans la pièce, bien différente de celles se trouvant dans son propre atelier. « Je ne suis pas vraiment un scientifique comme vous pouvez l'être. » Il n’en éprouve nulle affliction, au contraire, il semble fier d’être ce qu’il est ici.

Au derniers mots du scientifique, le regard d’or semble perdre en éclat. Un vague à l'âme qui, pourtant, ne s’attarde pas, s’échappe comme un mirage perdu dans un désert oublié. Ses mots demeurent détachés lorsqu’il répond à ce qui n’a sans doute nul besoin de réponse. « Leurs mots sont parfois dures, mais ils ne sont pas toujours dénués de sens. » L’ombre d’un souvenir. L’ombre d’un sourire. Depuis longtemps, les souvenirs se sont fanés, comme leurs vies qui appartiennent au passé.

- Dans l'mile, Emile ! Drogue de combat, ma spécialité.

En réalité, la drogue était sa spécialité tout court, quelle soit pour le combat ou plutôt récréative. Il avait touché à tout de par sa jeunesse particulière et en prenait encore régulièrement pour s'amuser, même si avec le temps il lui faille des dosages plus conséquents. Foutu corps qui s'habituait. Même la codéine ne lui faisait plus trop d'effets maintenant. Sacrée chienne de vie.

Forgeron. Il resta un instant à réfléchir à la question. Si les armes le passionnaient, il ne s'y connaissait pas plus que cela. Il avait même du demander l'aide de Hanae lorsqu'il avait eu besoin de modifier son équipement en conséquence. Pouvoir tirer des cartes tranchantes nécessitait le meilleur du matos disponible mais il n'était pas parvenu à l'améliorer. Elle, elle avait su. Savoir qu'il avait un expert en face de lui était intriguant.

- T'as vu ma gueule ? T'as franchement l'impression que j'suis un scientifique comme les autres ? Je sais bien que j'sors un peu du lot. M'enfin j'ai l'habitude, c'est comme ça depuis que j'suis môme. Ici au moins, j'peux m'éclater. Et y'a d'autres cerveaux comme le mien, ca aide à pas se sentir trop à part.

Certes, il ne leur parlait pas plus que cela mais au moins ici il ne passait pas pour un énergumène sous prétexte qu'il était un génie dans son domaine. Ses excentricités passaient plus facilement ici. Quant aux dernières paroles prononcées, il y avait évidemment du vrai.

- Comme tu l'as dit. Ou en d'autres termes : "y'a que la vérité qui blesse".

Il lui adressa un petit clin d'oeil alors qu'il s'amusait de nouveau avec une de ses cartes, sacré tique qu'il avait. La discussion étant engagé, même si pas passionnée encore, il sautait sur l'occasion d'en apprendre plus.

- Du coup si ta spé, ce sont les armes pour niquer les esprits, c'quoi ta plus belle oeuvre ? J'veux dire, y'a forcément un truc dont t'es plus fier que toutes tes autres créations nan ? Un artiste a toujours une préférence. C'comme une mère avec ses enfants. Elle chippotte, elle dit qu'elle les aime tous pareil, mais on sait que ce sont des conneries. T'as toujours un préféré, c'qui veut pas dire que t'aimes pas les autres. Désolé, j'suis un peu parti en couille là.

Il se grattait la tête, s'apercevant qu'il avait parlé d'un traite.

Drogue de combat. Katsuo n’a jamais été très au fait de ces substances quand bien même en avait il de vagues connaissances. Contrairement visiblement à son interlocuteur qui, d’après ses propres dires, en est un spécialiste. Il n’ignore pas que les scientifiques présents dans l’organisation travaillaient sur des sujets aussi divers que variés, et il aurait été bien en peine de tous les dénombrer - ou d’y porter un réel intérêt. Après tout, ici, il ne se considère guère comme un combattant et ce n’est pas dans cette optique qu’il avait accepté la proposition de l’Ultima Necat. « Je n’y connais pas grand chose dans ce domaine. » Avoue t-il sans mal à son interlocuteur, ne voyant guère l'intérêt de dissimuler cette méconnaissance. Chacun ses spécialités.

A sa question, le forgeron détaille son interlocuteur. A ses yeux, il ne diffère pas grandement des autres scientifiques qui parcourent les lieux, moins encore en observant la pièce dans laquelle il travaille. Néanmoins, il comprend. La différence isole. « Nous sommes tous un peu à part ici. » L’UN tirait sa force de leur marginalité. De leurs différences. Peut-être est ce cela qui faisait sa force… ou bien est ce cela qui causera sa perte à termes. Mais cela n’a pas grande importance à ses yeux.

L’ombre d’un sourire glisse sur ses lèvres à sa réponse avant que les prunelles mordorées n’attrapent le geste de son interlocuteur. Une carte avec laquelle il jouait depuis le début de leur discussion, la faisant apparaitre et disparaitre entre ses doigts avec dextérité et semble t-il, un rien d’inconscience. Une habitude ancrée qui ne l’empêche pas de reprendre la conversation. A ce jeu, le scientifique est plus doué que lui.

La question le surprend. A vrai dire, il parle rarement de ce sujet, non parce qu’il n’aime pas l’aborder, loin de là, mais davantage parce que les personnes s’y intéressant étaient rares et ceux l’abordant sur le sujet l’étaient tout autant. Sa plus belle création. Ses doigts viennent rejoindre son menton, se laissant quelques instants de réflexion avant que la réponse ne s’échappe de ses lèvres avec assurance - et un rien de passion tranchant avec le ton détaché qu’il utilisait jusqu’alors.

« Rīfusuraisā. » Le nom s’échappe sans peine de ses lèvres. Il y a une fierté certaine dans son ton. « C’est un jintachi que j’ai forgé pour le fils du seigneur de nos terres. J’ai mis plusieurs semaines rien que pour sélectionner les matériaux que j’allais utiliser pour le forger. Et j’ai mis tout autant de temps pour le réaliser. D’autres artisans m’ont aidé à le sublimer mais j’ai tenu à le réaliser dans son entièreté moi même. » Pour lui, cela avait été important. Baignée dans son pouvoir, il avait fait en sorte qu’elle puisse le protéger même des esprits qui pourraient lui barrer la route.

Un rien de nostalgie glisse sur son visage. Une époque à présent révolue… et un ami qui n’était plus. Son regard se perd avant qu’il ne finisse par laisser ses paupières s’éteindre. La fierté laissant place à cet air détaché qu’il arborait jusque là. « Il ne doit plus avoir trace de lui à présent. »

Un peu à part. C'était peu de le dire. Chacun avait sa mentalité, sa façon de travailler. Sa spécialité. Pour autant, ils œuvraient tous pour atteindre le même but, même s'il n'était pas à exclure que certaines personnes aient aussi leur objectifs personnels. Question de logique, c'était humain d'ailleurs.

Un changement, presque imperceptible, se produisit alors que Katsuo répondait à sa dernière question. Pour quelqu'un qui était habitué à "lire" les gens, au travers de leurs paroles, au travers de leur gestuelle, il n'était pas difficile de comprendre que ce sujet revêtait un réel intérêt pour ce dernier. Mickael ne put s'empêcher de sourire alors qu'il tendait l'oreille, véritablement intéressé par ce que lui expliquait son compagnon.

Le sublimer. Rien que le terme en lui-même était fort. Seulement la conclusion fut aussi abrupte qu'imprévue. Disparue ? Une telle oeuvre ? S'il n'y connaissait pas grand chose, Diamond ne pouvait s'empêcher de croire que ce n'était pas possible. Pas après un tel travail de façonnage, de sélection. D'ailleurs sa tête mimait déjà un "non", faisant écho à ses pensées. Il cessa de jouer avec sa carte, qui semblait d'ailleurs avoir disparue, croisant les bras sur son torse.

- J'peux pas y croire, mon pote. Et t'es sans doute le plus à même de l'savoir nan ? Un tel travail ne peut pas avoir disparu. D'ailleurs, t'as débuté une histoire mais sans réellement m'dire ce qui aurait pu lui arriver, à ce Jintachi.

Il savait que pour les revenants, le plus gros problème restait la mémoire. Sans doute que cela s'était déroulé au temps de sa première vie et qu'il était alors difficile de savoir ce qui avait pu se passer. Seulement une telle oeuvre méritait qu'on s'y attarde non ?

- Pourquoi t'essaies pas de savoir ? On a des ressources, des moyens que d'autres ne possèdent pas. Et un cerveau, contrairement à certains de nos camarades. Utilises ces moyens pour découvrir ce qui lui est arrivé. Imagine qu'il soit encore là, quelque part. T'accepterais qu'un tel travail reste perdu ? Ca m'foutrait en rogne, perso. Mais j'suis pas un artiste comme toi, alors y'a sans doute des trucs qui m'échappent.

Et ce serait clairement pas la première fois. Lui ne pouvait pas se targuer d'être un Maître. Créer. Une chose qu'il faisait à son échelle mais c'était éphémère. Une drogue, finalement, ce n'était que de la chimie. Alors que Katsuo, c'était autre chose. Plus durable.

- Tu l'as dit toi même : tu as tenu à le faire toi, de tes propres mains. Vas au bout du truc. Retrouve-le. Ou au moins assures-toi de ce qui lui est arrivé. 'Fin, sans te commander hein. Après tout, j'suis qui pour te conseiller.

Et il éclata de rire, frappant du plat de la main sur le bureau. En apprendre plus sur l'histoire de cet objet ne le dérangerait pas d'ailleurs. Après tout, qui n'aimait pas les histoires passionnantes ?

Un air un rien réprobateur vient glisser sur le faciès de son interlocuteur. Un “non” inconscient qui lui fait cesser son jeu avec la carte entre ses doigts. Etrangement, il semble prendre davantage à cœur que lui-même la perte de ce qu’il pouvait pourtant considérer comme l'œuvre de sa vie. Un rien de surprise glisse dans ses prunelles face à cette constatation, devant ces paroles presque courroucées.

Pourquoi ?

La question s’attarde dans son esprit, ainsi que celles qui suivent. Des questions qui résonnent en lui, comme un écho d’interrogation plus anciennes. Oubliées. Enfouies. Des questions dont nulle réponse ne peut être trouvée en cette ère. « Difficile à dire. Dans le meilleur des cas, il aurait pu être transmis à sa descendance. Dans le pire, il a pu être perdu, ou bien brisé. C’était il y a plusieurs siècles. » Lui s’avère bien plus pragmatique dans ses réponses et son ton demeure à l’image de ses réponses. Il y avait déjà réfléchi en réalité. Lorsque son âme s’était éveillée ici, à cette époque qui n’était pas la sienne.

Que devait-il faire ? Comment devait-il vivre ? Que s’était-il passé pour eux ?

Des interrogations qu’il avait laissé mourir dans un coin de son esprit, au même titre que tout son passé. Après tout, qu’est ce que cela lui apporterait de savoir ? Qu’est ce que cela changerait pour lui, aujourd’hui ? Ses bras viennent se croiser sur son torse, ses mains disparaissant dans les manches de son kimono. Cela n’a plus d’importance à présent. « Même avec les ressources de l’Ultima Necat, je doute qu’il soit possible de retrouver cette arme. Si tant est qu’elle existe toujours. » Par ailleurs, il n’a lui-même aucune compétence, ni même connaissance en matière d’investigation. Mais cela lui semble si évident qu’il n’en fait pas mention.

Et puis cela en valait il seulement la peine ?

Un éclat de rire finit par ponctuer son conseil. Un homme étrange. Un marginal. Oui. Sans doute l’est il lui aussi finalement, malgré les apparences. « Je comprends votre point de vue, mais je crains de ne pas le partager. » Il n’y a aucune dureté dans ses propos, au contraire, son ton semble presque doux à ses mots. « Savoir n’apporte pas toujours les réponses escomptées. » C’est le choix qu’il avait fait et qu’il continue de faire aujourd’hui. Même si cette arme est précieuse pour lui, même si elle a une place à part dans son cœur… au final, la retrouver ne lui rendrait pas ce qu’il avait perdu.

Brisé ? Diamond ne pouvait croire ce qu'il entendait. Katsuo était doué, cela ne faisait aucun doute, mais il avait un réel problème de confiance en ses capacités. S'il s'agissait là d'un des bijoux de sa création, comment pouvait-il croire que ce dernier puisse être brisé même après plusieurs siècles ? L'idée que le bonhomme face à lui ait pu appartenir à une autre époque était toujours aussi difficile à accepter mais pour le moment, il mettait de côté ce sentiment. Pour l'heure, on parlait de ses créations.

L'idée de la transmission paraissait être la plus logique. Qu'importe l'époque, l'héritable avait toujours été au coeur des préoccupations humaines. Un tel trésor pouvait aisément se transmettre génération après génération. Au pire, l'un des descendant aurait pu chercher à le vendre mais même ainsi, il ne serait sans doute pas si difficile d'en retrouver la trace. Les trésors anciens n'étaient pas si fréquents, surtout s'ils étaient d'excellentes factures. Diamond se surprenait à vouloir y croire.

- Tu vois quel est l'problème là, nan ?

Il croisait les bras sur son torse. L'Ultima Necat possédait de grandes ressources, c'était évident. Mais ici, on pouvait même utiliser les moyens "communs". On parlait d'une oeuvre tout à fait particulière après tout.

- T'as baissé les bras avant même de faire les efforts de chercher. Tu pars du principe qu'il est soit brisé, soit perdu. Et qu'on peut rien y faire. J'trouve ça dommage mais bon, comme dit, chacun sa merde hein. En plus, t'es pas tout seul. Perso, si t'as envie, j'peux te filer un coup d'main tu sais. Suffit de demander.

Sous ses airs d'éternels adolescents, on percevait une envie réelle de prêter son concours dans une action qu'il estimait utile, juste et surtout intéressante. Mais ici, il ne ferait rien sans une demande express. Pas par égo, pour le coup. Mais seulement parce qu'il s'agissait des affaires de Katsuo. Et qu'ils n'étaient pas réellement amis. Ainsi ne se mêlerait-il pas de ses affaires. Enfin pas plus que maintenant quoi.

- C'est peut-être le seul point sur lequel j'suis d'accord avec toi. Apprendre la vérité ne serait pas forcément source de libération, là dessus j'suis OK.

Frappant dans ses mains, Mickael se redressa finalement complètement, attrapant la boite qu'on lui avait ramené précédemment.

- Allez, c'est pas tout ça mais j'ai encore du taff et un colis à ouvrir moi. Encore merci d'ailleurs. Et de toi à moi, si un jour tu changes d'avis pour ton trésor là, tu sais où m'trouver nan ?

Il lui adressait un petit clin d'oeil alors qu'il prenait la tangente. On ne le changerait pas.

Fin du rp me concernant. J'trouve marrant de finir sur ce point xDD

Le problème ? Il ne répond rien, se permet juste un haussement de sourcil pour accompagner son interrogation muette. Et lorsque le cups continue, le forgeron ne peut s’empêcher de dévier un instant son regard ambré de lui. Il ne peut pas lui donner tort sur ce propos. A dire vrai, la pensée l’avait un moment traversé mais il s’était vite rendu compte que cela ne lui apporterait rien au final, si ce n’est de savoir que certaines de ses armes avaient pu traverser les siècles. Sans doute cela attiserait-il sa fierté mais au final, qu’est ce que cela changerait pour lui ? Qu’est ce que cela changerait à sa situation ?

Est ce que ce ne serait pas pire de les retrouver et de constater que tout avait changé autour d’eux ?

Peut-être réfléchissait-il trop. Sans doute. Mais il avait abandonné l’idée pour se contenter de faire ce qu’il faisait de mieux : forger de nouvelles lames. Des armes différentes qu’ils auraient pu faire par le passé et parfois des armes semblables à ce qu’ils avaient pu faire à l’époque. L’un et l’autre lui convient. Néanmoins, en parler avec son supérieur ravive certaines pensées, certaines émotions qu’il avait pu ressentir à l’époque. Même si les retrouver ne changera rien… il le sait.

Finalement, la conversation s’arrête là et le forgeron acquiesce pour laisser son interlocuteur reprendre son travail. Néanmoins, avant de partir, il adresse un sourire léger au cups. « Merci… pour votre proposition. J’y penserai si je change d’avis. » Il s’incline poliment face à lui avant de s’échapper du laboratoire pour retourner au sein de sa forge. Lui aussi après tout a du travail qu’il ne doit pas négliger.

Et peut être… Peut être pensera t-ill plus sérieusement à cette proposition à l’avenir. Peut être… même si ça ne change rien à cette vie qui est la sienne aujourd’hui.