Gotei groupe #2 : Quartiers nobles

S’il y avait bien une chose qui ne pouvait se prolonger trop longtemps sans que le problème ne soit réellement pris au sérieux, c’était bien le fait de s’en prendre à la Noblesse. Au seins des hauts quartiers, la rumeur se répandait. Quelqu’un s’en prenait à eux. Pire encore, le Gotei 13 semblait être incapable d’y faire quoique ce soit.
Une telle situation retombait doublement sur Nozomi. A ce rythme, sa famille pourrait être prise pour cible. Mais en plus, bien que sa division n’était pas directement chargée de la protection de ce lieu, il était évident que la Justice se devait de punir le, ou les, responsable.
Des mesures avaient commencé à être prises. Rapidement, cela s’était révélé insuffisant.

Peut-être sous l’insistance de la Chambre, plusieurs d’entre eux devant certainement craindre pour leur tête, le Conseil avait mis en place une équipe. Et, pour le coup, il ne pouvait pas faire de doute que les moyens furent déployés.
En premier lieu, deux Capitaines. Elle-même bien sûr, mais également son homologue de l’ombre, le Capitaine Igarashi. Pour les seconder, une représentante de la Huitième Division. Shugosshin Akemi, Troisième Siège de celle-ci, celle-là même qui avait été présente la nuit où les deux sus-nommés avaient remarqués la disparition du patriarche des Shimura.
Dans un sens, ils étaient des choix logique. Bien plus que le dernier. La Commande en Second du Kidōshū. Si ses compétences devaient être certaines vu son rang, la cheffe des Tomoe surveillait cette dernière, faisant partie des personnes récemment libérés d’emprisonnement afin de renforcer les rangs du Gotei 13.
Et puis, les rapports semblaient insister sur une tendance pour la jeune femme de ne guère faire preuve de discrétion.

L’équipe désignée, le tout était maintenant de se préparer.
Bien entendu, il s’agissait de se retrouver dans les quartiers concernés à la tombée de la nuit. La configuration serait bien similaire à l’autre nuit, à une différence prêt. Ils seraient sur leur garde et préparés à agir.
Le tout était d’avoir un plan d’action.

>> Je pense que tout le monde a compris l’importance de la mission, et j’espère que nous réussirons à en apprendre plus cette nuit. Vu la discrétion qui nous est demandée, je pense qu’il serait logique que vous preniez la tête de cette équipe Capitaine Igarashi. Il s’agit bien plus de votre domaine que du mien.

L’orgueil de la noblesse ne pouvait pas justifier de mettre en jeu la réussite de cette tâche. Ainsi, Nozomi se devait bien de reconnaître ne pas être la mieux placée en cet instant pour ce rôle.

En temps normal, Sora ne se serait pas offusqué de voir des nobles s'envoler. En ce qui le concernait, moins il y en avait et mieux il se portait, il ne s'en était jamais caché.
Mais il fallait bien admettre que la façon dont leurs « mystérieuses disparitions » - il pariait sur leur mort, mais on lui avait fait comprendre qu'il valait mieux ne pas leur dire à voix haute - s'étaient multipliées ces derniers temps avait de quoi inquiéter ; assez pour que cela relève de ses attributions.

Ce n'était pas de gaieté de cœur, mais il allait donc lui falloir personnellement s'en mêler ; ordre de la direction. Non seulement parce que mettre moins que des Capitaines sur le coup aurait certainement froissé l'un ou l'autre gros bonnet, alors qu'ils tremblaient pour leur sécurité, mais aussi parce qu'il avait personnellement assisté à l'un de ces enlèvements, même s'il ignorait encore à l'époque que ce n'en était qu'un parmi d'autres.
L'on pouvait en dire autant de deux autres des personnes mises sur l'affaire - la Capitaine du Kyubantai, Tomoe Nozomi, et la Troisième Siège du Hachibantai, Shugoshin Akemi ; il avait retenu cette fois -, qu'il avait rencontré par hasard sur les lieux cette nuit-là.
De par la nature confidentielle de leur opération, il était entendu qu'ils ne pourraient pas être plus de quatre - ce qui ne le rendait que plus sceptique sur le quatrième membre qu'on lui avait imposé pour leur petite équipe.

Avoir un membre du Kidōshū avec soi était utile dans bien des situations, mais une mission secrète était l'une de celles où ils n'avaient absolument pas leur place, le moindre sort de Kidō s'accompagnant généralement de sons et lumières à même de réveiller la moitié du quartier.
Plus encore quand le sort en question était lancé par Yane Yoru.
Sans jamais l'avoir rencontrée en personne, les quelques pages qu'il avait feuilleté dans son dossier avait suffi Sora à déterminer qu'elle serait une perte acceptable s'ils devaient se trouver confrontés à un quelconque danger.
Hélas, pour l'heure et dans l'attente d'un « malheureux accident », il n'avait d'autre choix que de s'en accommoder.
Sans surprise, la Capitaine de la Neuvième préféra lui confier les rênes de cette opération, soulignant que cela relevait davantage de sa spécialité. Elle n'avait pas tort, même s'il avait dans l'idée que ce soit également pour s'éviter un blâme au cas où ils n'aboutiraient à rien une nouvelle fois. Il se contenta donc d'opiner.

▬ C'est triste à dire, mais nos soldats respectifs ont quadrillé le secteur lors d'une des précédentes disparitions et n'ont rien trouvé. La personne qui en est à l'origine est manifestement très douée pour effacer ses traces... Il marqua une courte pause. ...autant que le serait un membre de l'Onmitsukidō. Je ne sais pas si l'on peut parler de traîtres, mais c'est la seule manière d'expliquer que même nous n'ayons rien trouvé : que le ou les responsables aient des compétences au moins équivalentes aux nôtres et sachent après quoi nous allions chercher.

Il soupira, tapotant du bout de l'index le pommeau du sabre rivé à sa taille.

Ils ne pouvaient pas ne pas savoir que des Shinigami finiraient par être mobilisés en s'en prenant aux nobles, et ont donc dû élaborer leur mode opératoire en prévoyant qu'on finirait par être impliqués... Et ils ont tout l'air d'avoir bien fait leurs devoirs. En bref, dans le meilleur des cas, ils sont très bien renseignés... Et au pire, ils sont des nôtres, ou au moins en ont de leur côté. Son expression se durcit. Dans tous les cas, à moins qu'ils se relâchent brusquement, on ne risque pas de trouver des traces. La conclusion est claire : le mieux à faire est encore de leur tendre un piège et de les prendre sur le fait. Il avisa les deux nobles du quatuor. Évidemment, ce serait largement plus simple si nous avions la moindre idée de l'endroit où ils vont frapper. Est-ce que vous avez pu établir le moindre point commun entre les différents disparus ?

À part le nombre de zéros sur leur compte en banque, cela va sans dire.

Il paraît que dans la vie, il faut apprendre à s'accommoder du revers de la médaille.

La médaille, en l'occurrence : recevoir un ordre de mission convoquant Yoru pour participer à une opération interne, faisant suite à une enquête dont elle a vaguement eu vent à une époque - quelque chose qui concerne les nobles, et elle ne sait quelle menace mystérieuse. Si les nobles, bon, disons-le franchement, elle n'a strictement rien à carrer, c'est en revanche l'occasion idéale pour sortir un peu de ses quartiers et profiter du bon air printanier. La dernière fois qu'elle a sérieusement foutu le nez dehors pour autre chose qu'un trajet boulot-dodo - en dehors de ses congés, le sacro-saint jour de shopping post-salaire étant respecté à la lettre -, y avait encore un risque de se casser la gueule en glissant sur du verglas.

Le souci, c'est la violence du revers : en plus de l'objectif franchement pas excitant (à un moment, les nobles, ils ont qu'à se démerder eux-mêmes s'ils sont si supérieurs), voilà qu'on l'a collée sous la supervision des deux Capitaines à la tête des deux pires divisions du Gotei - rien que ça. Les forces spéciales et la justice. Si elle ne leur a jamais vraiment adressé la parole, leurs tronches suffisent pour comprendre qu'ils ne sont pas là pour s'aérer la couenne sous un beau ciel nocturne... sans parler de l'inévitable méfiance dont elle s'attend à les voir faire preuve envers elle, rescapée de la Prison centrale. De parfaits opposés, quoi.

Mais soit. Faute de grives, on mange des merles, et là on est carrément passés du merle aux vieux poulets. Il va en falloir, de l'assaisonnement.

En parlant de poulets, les voilà réunis à l'heure dite, leur groupe au complet. Chose assez rare pour être signalée : si Yoru n'a quand même pas enlevé ses lunettes aux verres oranges de son nez, elle a fait l'effort appréciable d'ôter ses énormes bottes habituelles pour porter son uniforme au complet, beaucoup plus silencieux (parce qu'en cas de filature, faire clic-clic en marchant, c'est très moyen, quand même); malgré l'absence de semelles compensées, elle n'en domine pas moins tout le monde par sa stature, si ce n'est l'agent secret en chef. Elle reste muette le temps que les deux Capitaines s'expriment, mais finit par partir d'un petit rire qu'elle ne peut réprimer devant l'absurdité de son affectation, interrompant temporairement la réflexion du James Bond du Seireitei.


- Un piège, vous dites? Pour la discrétion, je vais faire ce que je peux, mais j'ai jamais été calée en dissimulation et mon reiatsu est ce qu'il est, doooonc... je vous laisserai les trucs de ninjas, et je m'occuperai du soutien technique et, euh, balistique. Si ça vous convient. Sans rire, je sais pas ce qu'ils ont foutu à m'assigner à CETTE mission en particulier - la dernière fois que j'ai participé à une infiltration, c'était à la plage, là, on s'est fait gauler et renvoyer chez mémé en moins de trente secondes, ils ont lu le rapport des Capitaines Yūko et Nagatsuki ou ils se sont torchés avec?


Elle interroge les autres du regard, mais personne ne semble disposé à lui apporter une réponse, alors tant pis : sur ces informations on ne peut plus rassurantes pour ses équipiers, elle se contente de hausser les épaules.


- Au moins, ça me fera une balade printanière. La nature se réveille, les oiseaux reviennent, on crame des mecs... Attendez, on va bien cramer des mecs, hein? Là, ça taperait direct dans mon domaine d'expertise !


Bref : aujourd'hui, Yoru se fait discrète telle la musaraigne.

On prend les mêmes et on recommence, ou presque. Le quatrième membre de leur équipe est plutôt original. Pas noble, pas vraiment doué en discrétion. Bref, il semblerait que les hautes autorités n’aient pas mieux à leur refiler comme soutient pour cette affaire. Cela étant s’il doit y avoir un combat, la Commandante en second aura toute son utilité.

« Si nous trouvons ceux qui sont derrière tout cela. Ma foi, je ne vois pas d’inconvénient à ce que vous en cramiez quelques uns. »

Sanction anticipée, que l’on pourra aisément faire passer pour de la légitime défense au besoin. La Shugoshin est tout à fait disposée à fermer les yeux si c’est pour donner une bonne leçon à ceux qui s’en prennent aux siens. Elle-même ou son précieux Suzerain pouvant risquer d’être visés par ces disparitions, elle ne tient pas à faire preuve d’une once de compassion, bienveillance ou tolérance envers les criminels.

Si Akemi n’est « que » troisième siège, elle n’a rien à envier à ses collègues de mission. Depuis le congé/disparition de son Fukutaisho, elle est redevenue la plus haut gradée de la Huitième. En tant que protectrice du Seireitei, elle a donc toute sa place ici. Le Capitaine Igarashi prend le commandement du groupe et elle ne s’y oppose pas, trouvant cela logique. A sa question, elle sort les rapports top secrets des disparitions.

« Le lieu des enlèvement ne semble pas être une piste significative. Voyons l’identité de ces personnes... »

Tandis qu’elle prend connaissance des différentes victimes, elle tente de trouver un lien entre elle. Les feuilles sont survolées et elle y cherche également tout indice qui pourrait être utile bien qu’aucune trace ne semble avoir été laissée à chaque fois. Elle laisse également qui le souhaite parcourir les documents, en particulier Nozomi qui connaît bien les nobles, certainement mieux qu’elle-même d’ailleurs.

« Si on ne trouve rien j’imagine qu’il va falloir espérer prendre les ravisseurs en flagrant délit. »

C’est un peu ironique d’espérer qu’un enlèvement ait de nouveau lieu, mais parfois, il n’y a pas d’autre choix.

Que dire si ce n’était que la surprise n’était absolument pas présente ? La membre du Kidōshū allait être difficile à supporter visiblement. Ce n’était même pas tant vis à vis de son dossier, qui était pourtant un sérieux point négatif aux yeux de la Capitaine, que de sa façon d’être. Pourtant, même une idiote pourrait comprendre le sérieux de la tâche, surtout vu la présence de deux Capitaine. Même si cela pouvait être un ordre qu’elle n’appréciait pas, le tout était normalement de se comporter dignement.
Il n’en était bien entendu rien. Au contraire même, elle semblait bien vouloir faire comprendre à quel point rien dans cet assignation n’avait l’air de lui convenir. Ce n’était que le début, la patience de Nozomi était donc encore existante, mais à ce rythme elle risquait d’être tentée de lui dire de rentrer dans ses quartiers si cela l’importunait autant.
Forcément, cela serait noté dans le rapport, mais c’était une autre histoire.

Pour l’heure, elle préférera concentrer son attention sur le lien qui pourrait exister entre les victimes. Après plus grande analyse, il était possible de remarquer une chose. Ce qui semblait être commun à celles-ci n’était pas tant le statut social que le fait qu’ils étaient au final des noms avec une certaine renommée au sein du Seireitei.
Si cela aurait aussi peu coller à la seule disparition de membres du haut de la société, le fait que cela soit plus large semblait confirmer une chose.

>> Sans surprise, on en revient au jeu de la politique. Je ne serais pas surprise que quelqu’un cherche à gagner en influence. En regardant qui aurait pu s’élever depuis le début de ces disparitions, il serait peut-être possible de découvrir un commanditaire.

Si les victimes n’étaient que des nobles, la jalousie ou une haine quelconque aurait pu être la cause. Et donc les coupables n’auraient pas forcément été engagés à cet effet.
Quand on jouait dans les complots, celui qui en profitait n’était que rarement celui qui se salissait les mains, d’où l’intuition que les coupables n’étaient que de la main d’oeuvre. Compétente, mais les débusquer ne mettrait pas forcément fin au problème.
Après cette nuit, il serait donc nécessaire de découvrir le nom du responsable. Mais chaque chose en son temps.

>> Dans l’heure, trouver les exécutant reste prioritaire et comme il est évident que nous ne sommes pas face à des débutants, cela risque d’être une tâche déjà notable. Et, à défaut de pouvoir anticiper la prochaine victime, je crois qu’il ne reste pas énormément de possibilités.
Se séparer, couvrir du terrain et réagir dès que quelque chose se produit. Le problème est de réussir à être témoins d’attaque ne laissant généralement pas de trace, et donc d’avoir des yeux partout sans se faire repérer. Le fait que nous les ayons déjà dérangé une fois prouve au moins qu’ils ne sont pas infaillibles…

Bien sûr, il y avait aussi le risque que rien ne se produise cette nuit, auquel cas cela signifierait possiblement plus jours de veille.

Sora aurait largement préféré régler toutes ces histoires à sa manière, d'autant qu'il y avait de fortes chances que les coupables soient liés à l'Onmitsukidō de près ou de loin. Hélas, on avait préféré lui coller dans les pattes des équipiers qui - sans mettre en doute leurs qualifications - n'étaient peut-être pas les mieux équipés pour mener à bien.
La furtivité - la vraie furtivité ; pas celle consistant uniquement à éviter de faire du bruit - ne comptait parmi les compétences que d'un petit nombre de Shinigami, dont l'immense majorité travaillait déjà sous ses ordres.
C'était après tout la seule affiliation qui permettrait à cette habilité d'être pleinement exploitée ; c'était aussi ce qui lui avait permis d'en arriver à ces conclusions sans traîner. On ne devient pas capable de fausser compagnie à deux Capitaines - même distraits - juste en sortant de l'académie.

Tout cela pour dire, donc, que Sora n'était pas forcément dans les meilleures dispositions pour gérer cette affaire avec ce qu'il considérait comme un handicap ; les gloussements de la Vice-Capitaine des Nécromanciens ne firent rien pour aider.

▬ Content de savoir que ça vous fait rire. trancha-t-il avec fermeté, la toisant d'un œil mauvais ; comme si elle ne partait pas déjà d'un assez mauvais pied. Ça me sidère d'avoir à le préciser, mais on ne brûlera personne avant de savoir ce qu'on a déniché. Toute cette opération est trop bien préparée. Il y a forcément plus qu'il n'y paraît. Quoi que l'on trouve, il faudra surtout les faire parler.

Et pour cela, personne n'oserait douter qu'il soit le plus qualifié. Malgré cette distraction, il consigna néanmoins les précisions données par les deux nobles dans un coin de son esprit, notamment le fait que les victimes n'étaient pas que des riches, mais aussi des personnalités notables de moindre envergure. Ils n'étaient pas plus avancés. La piste était hélas très maigre, mais à défaut de mieux, ils allaient devoir s'en contenter. Il fit écho à la proposition de la Capitaine Tomoe :

▬ On devrait se séparer en équipes de deux. Ce sera plus simple pour communiquer, et ça évitera que l'un d'entre nous se fasse attaquer pendant qu'il est isolé. Personne ici n'est assez faible pour se faire avoir facilement, mais autant jouer la sécurité.

Là où il aurait sans scrupule sacrifié une partie de ses hommes pour accomplir la mission - ils savaient dans quoi ils s'engageaient -, devoir collaborer avec d'autres Divisions l'obligeait à revoir un tant soit peu sa façon de procéder. L'on apprécierait sans doute assez peu que le rapport révèle qu'il avait laissé - au hasard - une Vice-Capitaine du Gotei trouver la mort dans le procédé, si ça pouvait être évité.

▬ Je ne sais pas quelles sont vos compétences en Kidō, mais je sais pratiquer le Tenteikūra, et j'imagine que... Il fit un effort visible pour rester civil dans sa façon de la désigner. ...Le vice-capitaine Yane en est également capable. Mieux vaut le privilégier si on veut éviter de se faire repérer, mais si vous n'avez pas le choix, je suppose que vous saurez vous faire remarquer.

L'ordre de mission précisant d'investiguer dans le plus grand secret, il convenait de ne pas affoler tout le quartier noble pour des raisons qu'ils ne pourraient pas expliquer.
Bien sûr, il partait du principe que la concernée avait ce qu'il fallait sur elle pour réaliser ce sort plus subtil que ceux auxquels elle était accoutumée... Le contraire serait décevant de la part d'un membre du Corps des Nécromanciens, mais il ne savait à quoi s'attendre de sa part.
Ou plutôt si : il ne le savait que trop bien. Et s'il ne demandait pas mieux que d'avoir une raison de la crucifier, il préférait ne pas l'obtenir au cours d'une tâche aussi délicate. Il serait toujours temps de la renvoyer plus tard au fond du terrier hors duquel elle avait rampé.

▬ Au vu de nos effectifs, il parait logique de placer un Capitaine dans chaque équipe. Shugoshin, vous serez avec moi.

Ce qui laissait à l'héritière des Tomoe le soin de se débrouiller avec celle que l'on qualifiait de danger public même parmi ses propres subordonnés. C'était sans doute pour le mieux : aussi sulfureuse que soit sa réputation, s'il devait la supporter, ce ne serait pas forcément la première à exploser. Ou en tout cas, pas de la manière qu'elle aurait préféré. Et puis, la Capitaine de la Neuvième Division n'avait-elle pas dit que son avis d'expert était à privilégier ? Il se tourna vers celle-ci :

▬ Vous au nord et nous au sud, ça devrait fonctionner... Bon, allez...

Faisant mine de s'en aller, il extirpa son sabre de son fourreau, lequel changea de forme sans que son nom ait eu à être prononcé pour devenir, au lieu d'un katana parfaitement ordinaire, ce que la plupart définiraient comme un couteau stylisé.
Aussitôt, la lumière autour de lui - pour le peu que la nuit avait encore à offrir - se mit à décliner, qu'elle soit naturelle ou le fruit de quelque torche ou bougie ; un camouflage dont la Troisième Siège pourrait également bénéficier si elle se dépêchait de le suivre comme il l'avait demandé.
Qui savait ce qui pouvait bien se tramer pendant qu'ils finissaient leurs préparatifs ?...

▬ Bon courage, lâcha-t-il en s'enfonçant dans la nuit.

Et elle l'accueillit à bras ouverts, comme elle l'avait toujours fait.

Si la demoiselle aux cheveux blancs semble un minimum réceptive à la suggestion de Yoru, la tronche d'enterrement tirée par les deux Capitaines confirme à cette dernière ce dont elle se doutait déjà : la cohabitation sera difficile.

Malgré tout, même la réprimande à peine voilée du bonhomme patibulaire n'entame en rien l'humeur de la Nécromancienne. Elle l'a intérieurement décidé avant même de foutre les pieds dans ce bourbier : elle ne permettra pas à quoi (ou à qui !) que ce soit de gâcher sa soirée. Elle s'apprête à rétorquer qu'on peut faire cramer quelqu'un et épargner les bouts nécessaires pour le ou la faire parler, mais se ravise - le Capitaine Igarashi n'a pas l'air spécialement intéressé par les détails, et encore moins enclin à débattre avec elle de l'aspect technique de la torture par le feu. Marrant - elle qui croyait que c'était justement son rayon, ce genre de méthodes...

Mais bon ! Voilà qu'on entre enfin dans le vif du sujet, et qu'une façon concrète de procéder se profile à l'horizon, à l'initiative de ce même Capitaine. Interpellée par celui-ci, Yoru se fend d'une réponse de rigueur, histoire de lui confirmer ce dont il se doute déjà.


- Commandante en second, plus exactement, le corrige-t-elle gratuitement à l'évocation de son grade. Techniquement équivalent, cela dit. Enfin, oui, vous avez raison, je sais faire, évidemment.


Elle a bien envie d'ajouter que c'est aussi pour cette raison qu'elle avait plus tôt proposé de servir de tour de contrôle pour le petit groupe, mais la suggestion du Capitaine Igarashi semble partir dans une toute autre direction, alors tant pis : ce sera pour un autre coup.

Bref, en deux mots, voilà qu'on lui refile la Capitaine Tomoe. Un peu chiant (elle aurait préféré se retrouver avec la dernière du quatuor, déjà un peu plus avenante), mais - et elle n'aurait jamais cru dire ça avant d'avoir vu le Capitaine Igarashi en personne - assurément pas la pire répartition possible. Puis au pire, hé, ça fera un peu de discussion sur le chemin. Au hasard, à propos d'une certaine Association. Ah, mais qui dit enquête furtive dit silence chiant, non? Une autre fois, peut-être... Mieux vaut ne pas faire l'andouille une fois l'opération réellement lancée, vu les institutions que représentent ses coéquipiers.


- Bon, bah c'est parti. Une petite seconde...


Imitant le geste du Capitaine Igarashi (mais formulant clairement l'incantation requise), elle dégaine son arme, laquelle s'allonge entre ses doigts jusqu'à prendre la forme d'un bident japonais. S'il est passablement encombrant, au point de se questionner sur l'utilité de le trimbaler ainsi pour patrouiller les environs, ce Shikai possède en revanche une propriété qui pourra leur être utile en cas de pépin : aussi préfère-t-elle l'avoir sous la main, prêt à l'usage.

Préférant une démonstration concrète à une explication, elle frappe le manche de l'arme contre le pavé. Contre toute attente, en lieu et place de l'épouvantable grincement habituellement émis par les lames du Zanpakutō lorsque son utilisatrice procède ainsi, absolument rien ne se passe. Et pour cause : atténué à l'extrême, et renvoyé plusieurs mètres au-dessus de leurs têtes pour faire bonne mesure, le bruit est à peine perceptible depuis le sol. Si Yanari exerce habituellement son contrôle sur le son pour faire un boucan pas possible, l'inverse est tout à fait dans les cordes de la Nécromancienne, après tout. Aussi étonnant que cela puisse paraître, étant donné la personnalité de celle-ci. Mais puisque la situation l'exige...

Le problème du bruit désormais réglé, les deux autres soucis demeurent : la vue, et la perception du reiatsu. Après tout, des criminels assez doués pour opérer sous le nez des Shinigami seront probablement capables de sentir la présence de gradés aussi puissants dans leurs environs immédiats, non? Parce qu'il est bien gentil, Jean-Michel Ninja, mais il s'est torché avec la moitié du briefing et s'est barré avant de trouver une solution à la différence de capacités de camouflage entre les deux groupes qu'il a lui-même désignés. Lâchant un petit soupir de contrariété, Yoru s'approche de la Capitaine Tomoe et récite une nouvelle incantation alors qu'elle laisse glisser sa paume libre dans les airs, formant derrière elle une traîne illusoire qui ne tarde pas à venir les recouvrir comme un manteau.

Ceci étant fait, un peu de communication avec sa partenaire de fortune est de rigueur.


- En quelques mots... Je vais me servir de mon Shikai pour étouffer au mieux les bruits de nos déplacements. Pour le visuel, je nous ai planquées derrière un Bakudō #26. Par contre, j'avoue que c'est déjà pas un truc que je fais souvent toute seule, alors pour deux personnes, ET en mouvement, je garantis pas l'efficacité. Si vous avez de quoi gérer de cotre côté, ce sera sûrement plus fiable.


C'est clair et net : Yoru fait déjà un effort d'adaptation remarquable pour ce genre de mission, compte tenu des circonstances, alors autant éviter tout handicap inutile. Bien sûr, si même quelqu'un comme elle peut trouver dans son arsenal de quoi jouer les ninjas de fortune en temps de crise, alors une Capitaine devrait avoir assez de ressource pour gérer seule en cas de besoin. Après tout, ce serait con de s'imaginer que le Capitaine Igarashi est parti du principe que c'est sur la Nécromancienne qu'il faudra compter pour la furtivité, quand il a décidé de les coller en duo ensemble. Totalement inimaginable.

Non?

Le raisonnement de Nozomi semble logique mais effectivement la personne à la tête de tout cela ne doit pas être celui qui se salit directement les mains. Alors la meilleure piste qu’ils peuvent suivre pour le moment c’est de se cacher et d’espérer tomber sur un suspect comme elle l’a dit un peu plus tôt. Le Capitaine Igarashi forme des groupes. Il n’est pas du genre à rigoler c’est certain. Il n’a pas tort cependant, il est vrai que la situation n’a rien de léger.

La Shugoshin ne se fait pas prier pour obéir docilement aux ordres et sans perdre une seconde, suit son binôme afin de profiter du camouflage qu’il lui offre. Direction le sud. La gardienne ne prononce pas le moindre mot pour ne pas se faire bêtement remarquer. Cela l’arrange bien, les relations sociales et les bavardages n’étant pas vraiment sa tasse de thé. Surtout en compagnie d’inconnu qui n’a de toute évidence pas envie d’être dérangé par des choses futiles et inutiles. Ils ne sont pas là pour cela de toute façon. Masquée visuellement, la jeune femme camoufle son reiatsu et use de sa grâce naturelle pour que ses pas soient silencieux.

Son katana n’est pas dégainé, mais sa main est placée préventivement sur la poignée. Habituée à faire des rondes dans le Seireitei car tel est sa tâche quotidienne, elle connaît bien les rues et est entraînée à percevoir ce qui sort de l’habituel. Elle se concentre davantage, cherchant à percevoir et détecter une énergie qui serait anormalement camouflée ou une attitude, un bruit étouffé qui pourraient être suspects. De même pour une lueur, une ombre ou un mouvement. En somme, tous ses sens sont en alerte.

Il était évident qu’elle n’appréciait pas forcément la répartition initiée par le Capitaine de la Deuxième Division. De tous les équipiers possibles, il fallait qu’elle tombe sur la pire. Le seul homme de l’équipe avait l’avantage d’être un Capitaine, et donc d’avoir la compétence qui devait aller avec, tandis que la Shugoshin avait sa lignée pour elle, à défaut de la connaître. La membre du Kidōshū avait comme principal trait de ne pouvoir être digne de confiance vu son passif.
Tapis au fond de mon hôte, nous observions, amusées. Elle occultait les désagréments initiés en se disant qu’au moins elle pourrait la surveiller, et serait donc en première ligne pour agir si jamais, comme il était possible de s’y attendre, cette Yoru dérapait. Cependant, elle espérait au moins que le sérieux de la mission arriverait à un moment dans son esprit.
Au moins, elle semblait avoir arrêté de se plaindre. Ce qui, il fallait bien le dire, était déjà un exploit.

Les équipes formées, ces dernières se séparèrent afin de couvrir plus de terrain, chacune y allant à sa manière. Si le Capitaine Igarashi semblait de toute évidence prendre la main dans la volonté de ne pas être repérés d’un côté, de l’autre ce ne fut pas la plus gradée des deux qui s’attela à cette tâche. Si la Commandante en Second, d’après son dossier, n’était pas forcément réputée pour la discrétion dont elle faisait preuve, elle possédait, forcément, des compétences en Kidō que la Tomoe n’avait pas et qui étaient capables de servir dans ce genre de situation. Plus surprenant, son Shikai semblait également aller vers une subtilité à laquelle la noble ne se serait pas attendue.
Le Zanpakutō était une manifestation de l’âme du Shinigami, se pourrait-il que la Nécromancienne ait une nature bien plus furtive qu’elle ne le présentait.

L’idée pourrait presque prêter à sourire dans une autre situation. Et, surtout, si la Capitaine n’était pas habitée par un sentiment des plus désagréable, surtout vu le contexte. Au fond d’elle-même, l’impression que tous ces efforts soient inutiles s’installait, s’ancrait. A quoi bon faire preuve de discrétion s’ils avaient déjà été repérés ?
Tel était le ressenti qu’elle avait, bien qu’elle faisait tout afin de ne pas le laisser paraître. Dans ce genre de cas, donner l’information d’être au courant de la filature était une erreur à ne pas faire. Avec un peu de chance, elle pourrait même retourner cette situation à leurs avantages.
Espérant que les tours de son alliée de fortune soient suffisants, elle prit la parole, à voix basse malgré tout.

>> Il est très probable que nous ayons déjà été repérées. Je ne sais pas d’où, mais je pense que nous sommes surveillées. Le mieux est de continuer à se mouvoir discrètement, comme si nous n’avions rien remarqué et que nous étions à la recherche d’un endroit où se mettre pour observer.
Et, surtout, de se tenir prêtes à réagir en cas d’action. Transmets l’information.

Si ce sentiment était vérifié, cela pourrait réellement être à leur avantage. S’ils n’avaient pas de réels débuts de pistes et avaient pour but de couvrir du terrain pour tenter de tomber sur quoique ce soit, le fait que leurs cibles se décident de venir directement à eux n’en serait que mieux. En cas de besoin, sa main se tenait prête à dégainer son arme en un instant.

La balade nocturne amorcée, Yoru passe mentalement en revue les sujets de conversation possibles. Impossible cependant de trouver de quoi briser la glace - qu'est-ce que ça peut aimer, précisément, une noble devenue Capitaine dans le département dédié à la Justice? Les trucs de luxe? La méditation en jardin zen? Les balais lubrifiés? Non, finalement, mieux vaut supporter le silence pesant qui s'est installé : au moins, la brune pourra faire semblant d'être concentrée sur son observation des alentours, tandis qu'elle rumine les raisons de sa présence ici.

Parce qu'elle est certaine que cette petite opération ne sert pas à grand-chose. Une patrouille, comme ça, au pif? Sans réel indice permettant de dire que là, ce soir en particulier, quelque chose va se produire? L'enquête doit être sacrément au point mort, pour dispatcher des gradés de cette façon. Ils se feront chier pendant des heures, c'est sûr et certain.

L'autre possibilité, c'est qu'on lui ait dissimulé des infos cruciales qui permettraient de confirmer qu'il se passera bien quelque chose dans les environs ce soir. Honnêtement, la Nécromancienne n'a même pas envie de demander. Elle se doute que ses collègues ne lui font pas des masses confiance, et elle le leur rend bien : aucune idée de ce que pense Nozomi, mais la tronche de Sora lui a immédiatement déplu, et vu sa réaction immédiate lors de leur échange, elle ne serait pas surprise que sa propre sécurité soit très bas dans la liste de préoccupations du bonhomme.

Ses interrogations, cependant, sont interrompues par son binôme, qui y coupe court en lui faisant part de ses soupçons. "Elle ne sait pas d'où", qu'elle dit. Autant qu'elle le sache, Yoru ne se souvient pas l'avoir sentie utiliser la moindre technique pour soutenir ses propos; si elles étaient dans un jeu de rôle sur table, elle lui demanderait combien de points elle a foutu dans sa stat de Détection pour être si sûre d'elle. Alors quoi, c'est juste de l'instinct? Jetant un regard en biais à la Capitaine, le sourcil arqué, elle hausse les épaules et s'exécute néanmoins, traçant les symboles requis en un éclair le long de ses bras. Et, dans un murmure, assez bas pour ne pas troubler le calme ambiant, mais assez perceptible pour résonner nettement dans l'esprit de ses correspondants, elle relaie l'information.


- Ici Yoru. La Capitaine Tomoe a un pressentiment et se sent observée. On reste vigilantes. Si ça dégénère, vous le saurez.


Un pressentiment... Oui, quel autre nom donner à l'information? Rien qu'un pressentiment. Il fait nuit, alors pour deux jeunes femmes seules et sans défense qui se baladent dans les rues, forcément, y a de quoi avoir peur de son ombre. Quand même...

Néanmoins, la Nécromancienne décide de jouer le jeu. Admettons un instant que la Capitaine ait raison - elle serait elle-même dans la merde si elle réagissait trop tard. Et puis, ce sera plus marrant de rester sur la défensive que de continuer à errer sans but en s'emmerdant comme deux rats crevés. Pouvoir finir la soirée en faisant exploser des trucs, voilà ce qui complèterait à merveille cette petite promenade nocturne!

Elle se penche vers son binôme, lui glissant à l'oreille quelques informations supplémentaires.


- Le sort tient toujours, que je sache. Si on nous surveille, les responsables savent clairement qui on est. Par extension, j'imagine que si ça dégénère, ils pensent pouvoir se tirer sans se faire prendre - ou pire, se défendre. Vous croyez qu'ils auraient un intérêt à le faire?


Beaucoup de points d'interrogation, pour peu de réponses encore disponibles. A ce stade, elle ne peut encore qu'extrapoler, mais la conclusion paraît assez logique à Yoru : en admettant que le pressentiment de la Capitaine soit avéré, elles ne seront attaquées que si le ou les agresseurs pensent avoir une réelle chance de s'en sortir face à ce qui est plus ou moins le boss final des nobles.

Pour l'heure, autant rester sur ses gardes. Les risques sont faibles, mais pas nuls - et s'il arrive quoi que ce soit à la Capitaine, on lui collera forcément la faute sur le dos. Raison de plus, donc, pour ne pas faire n'importe quoi.

Akemi l'avait suivi sans un bruit, lui confirmant qu'il avait bien fait de miser sur elle pour avoir la paix. S'il n'avait pas la moindre idée de ses compétences, au moins avait-il dans l'idée qu'elle serait moins encombrante que Yoru - et par conséquent, qu'il ne risquait pas d'être trop occupé à s'en débarrasser pour prêter attention aux détails.
Ce n'était pas un secret : Sora travaillait mieux seul, même ses propres hommes n'étant le plus souvent que tolérés dans son environnement proche, sur le terrain en particulier.
Bien sûr, il était toujours là pour donner des ordres, mais lui-même agissait de son côté, sans personne pour le ralentir, profitant pleinement de la liberté d'actions que le poste de Capitaine lui avait donné - sauf quand les ordres venus d'en-haut lui interdisaient.
Après tout, la seule à l'avoir jamais correctement épaulé n'était plus là pour s'en charger.
En l'occurrence, force lui était cependant d'avouer que la Troisième Siège avait son utilité : s'il lui était déjà arrivé de venir ici recueillir des informations - entre autres motifs plus personnels -, il ne saurait connaître aussi bien les lieux que quelqu'un qui y habite, y a vécu toute sa vie.
Encore dissimulés par la pénombre accrue que générait son sabre - au grand dam de l'âme de celui-ci, qui haïssait devoir tuer la lumière de la sorte -, ils reçurent simultanément des nouvelles de l'autre équipe ; en assignant Yoru aux communications, il avait omis de considérer à quel point il serait désagréable d'entendre sa voix résonner dans son esprit.

▬ Merveilleux, commenta-t-il avec aigreur, passant sa main libre sur sa tempe pour refouler la désagréable impression que le message lui avait laissé. C'était à prévoir. S'ils doivent s'en prendre à nous, ils ne vont pas le faire alors que nous sommes tous réunis.

Il avait envisagé cette hypothèse - ainsi que le fait que le Capitaine Tomoe serait prise pour cible s'il séparait les groupes comme il l'avait fait. Elle aussi était issue de la noblesse, et ils savaient déjà qu'elle avait assisté au dernier enlèvement ; une curiosité que la Capitaine en charge de la justice ne pourrait laisser passer.
Bien sûr, la Shugoshin et lui étaient également présents lors des faits, mais si, comme il l'avait envisagé, les coupables avaient quoi que ce soit à voir avec l'Onmitsukidō, sans doute seraient-ils plus réticents à se frotter à lui. Il était après tout le mieux placé pour déjouer leur stratégie. Il avisa son équipière, dont le calme lui avait permis de réfléchir pendant le trajet et d'établir une théorie :

▬ Mais si ce pressentiment est fondé... C'est allé trop vite pour être le fruit du hasard. Soit ils se préparent bel et bien à agir ce soir et on est bien tombés, soit ils surveillent le quartier en permanence. Il jeta un regard dans la direction d'où ils venaient. Ils savent que nous les avons surpris la dernière fois. Ils sont assez confiants pour continuer leurs activités en sachant qu'ils ont directement attiré l'attention de deux Capitaines, sans parler de tous les Shinigami qui regagnent le quartier tous les soirs. Donc il y a des chances qu'au moins l'un d'entre eux réside à proximité, qu'ils y aient une sorte de poste avancé.

Dans la mesure où il s'agissait d'une opération de longue durée, ce serait bien plus simple pour eux d'avoir établi un « quartier général » à proximité que de devoir aller et venir, au risque d'être surpris - et de devoir faire plus de victimes que prévu pour se faire oublier.
Mentalement, il passa en revue les membres de l'Onmitsukidō susceptibles d'avoir un accès légitime à une demeure d'aristocrate. Le tour devrait rapidement être fait : rares étaient, parmi les nobles, ceux prêts à abandonner le feu des projecteurs pour se consacrer aux opérations furtives. Au-delà de leurs vœux propres, leurs familles n'apprécieraient guère. Certes, il y avait Daestra, mais celle-ci était un cas pour le moins singulier.

▬ Est-ce que tu sais s'il y a des demeures abandonnées dans les parages ? Si c'est le cas, nous gagnerions à les examiner.

La grande majorité des familles nobles entretenant de véritables dynasties, il était rare qu'elles disparaissent tout à fait - et, de fait, laissent vacant le domaine qui leur était attribué. Et la noblesse étant un cercle fermé, elle n'accueillait que rarement de nouvelles têtes si ce n'est par naissance, l'adoption et le mariage étant généralement mal perçus. Un logement ainsi délaissé serait donc logiquement laissé vide un long moment.
En somme, l'endroit parfait pour qui voudrait y cacher quelque chose.
Peut-être même que l'un de ceux figurant sur la liste des disparus était-il l'ultime représentant sa lignée ; auquel cas serait-il sans doute parmi les premiers, pour leur faciliter la suite. Akemi saurait cela mieux que lui. Lui laissant le temps d'y réfléchir, prêt à la suivre si elle en avait à lui indiquer, il ajouta :

▬ Il va sans dire que les victimes ne sont pas choisies au hasard. Personne ne prend autant de risques sans avoir un but précis. Ce n'est pas la simple haine de la noblesse qui a motivé ces actes. Il y a forcément un lien entre les victimes, mais peut-être que quelques-unes n'ont été tuées « en plus » que pour brouiller les pistes. À ce stade, je doute qu'on puisse parler de conflit de voisinage... Peux-tu me dire de quoi parlent les nobles, ces jours-ci ? Y a-t-il quelque chose qui fait débat ?

Le message envoyé par la Commandante en second raisonne dans sa tête et la jeune femme en tire déjà ses conclusions. Les personnes ciblées sont souvent des nobles, mais surtout des personnes dont la position politique est importante et c’est le cas de Tomoe. Alors si c’est elle qui sent une présence, peut-être est ce parce qu’elle est ciblée en tant que potentielle prochaine victime. C’est la première conclusion à laquelle elle arrive et si elle a raison, cela pourrait être l’occasion de tendre un piège à ces mystérieux terroristes. Son collègue est le premier à réagir cependant. Sa réflexion est plus poussée que la sienne. Évidemment, on n’en attendrait pas moins du Capitaine de la Seconde. Mais pourquoi seule Nozomi les a-t-elle repérés ? Ou sentis du moins. S’ils étaient tous surveillés, Akemi aurait dû capter quelque chose.

« La Capitaine Tomoe est peut-être leur cible. » C’est ce qu’elle répond à Yoru. Pas de « soyez prudentes ». Non. Parce qu’au contraire, elles pourraient essayer de les appâter d’une façon ou d’une autre. Nozomi se montrant volontairement vulnérable pour les pousser à l’action. Et ce plan n’a rien de prudent. Donc la Shugoshin le garde pour elle. La Capitaine saura certainement quoi faire.

Chacun ses plans, sa stratégie. Là, elle doit s’occuper des objectifs donnés par son binôme. Une demeure abandonnée qui servirait d’avant poste est une bonne idée. Ils n’auraient certainement pas pris, au contraire, pour quartier général les sous-sols d’une maison habitée, celle du commanditaire. Si elle est fouillée, il serait aisément mis en cause. Mais d’un autre côté, ce serait plus facile pour gérer tout cela. Pas besoin de se demander comment ils ont pu cacher des allées et venues suspectes vue la discrétion dont ils font preuve. Deux noms lui viennent en tête et elle retient le plus logique.

« Tsunayashiro. » Dit-elle après avoir opiné.

Tout autre mot serait superflu. Le Capitaine est intelligent, il saura deviner son raisonnement. Il y a bien les Shiba qui possèdent des maisons inhabitées puisqu’ils sont presque éteints. Mais les Tsunayashiro ont également perdu de nombreux membres et si l’un deux a déjà été à l’origine de magouilles et de meurtres, alors ils sont davantage suspects à ses yeux. Et à leur place, elle occuperait une maison dont elle a un minimum le contrôle, plutôt que de prendre le risque de voir débarquer de nouveaux occupants. D’un signe de tête, elle indique à Igarashi de la suivre, puis prend la direction de la demeure souhaitée, espérant que cela donne un résultat concluant. Ils iront toutes les voir s’il le faut et elle usera de ses capacités de détection pour les analyser.

En ce qui concerne ses dernières questions, elle reste pensive, réfléchissant à ce qu’elle a pu entendre et qui pourrait correspondre. A-t-il été question d’Akihiko ? Ou de toute autre chose qui puisse mener à un conflit ?

>> Elève-toi au dessus du monde, Narukami.

A la vue des invités, les mots furent prononcés sans perte de temps, sans prendre le temps de répondre à l’interrogation de la Nécromancienne. Et si, d’ordinaire, la libération de son Shikai pouvait être un spectacle bien chorégraphié, elle se dispensa d’apparat. A peine dégainée, le Zanpakutō disparaissait, laissant l’anneau foudroyant, véritable coeur de cette forme, se matérialiser dans son dos, ce dernier générant alors sa nouvelle arme dans sa main, katana violacé aux finitions dignes de son rang.
La discrétion n’était plus de mise, et cela lui convenait, laissant cette spécialité à son homologue de la Seconde Division. La Justice qu’elle représentait de par son rang était plus visible et c’était face à son adversaire, l’arme à la main, qu’elle était le plus à l’aise.

Certains seraient le genre à vouloir discuter. S’assurer que ces inconnus étaient bien ceux qu’ils recherchaient. Connaître qui ils étaient, quel était leur but. Les questions avant l’action. Une méthode bien souvent efficace, il fallait l’avouer.
Nozomi n’était pas forcément ainsi. Quelles étaient les chances que six individus mystérieux et armés, apparaissant soudainement devant leurs yeux, sans la moindre annonce, soient étrangers à la raison de leur présence nocturne ? A ses yeux, suffisamment proches de zéro pour ne pas émettre de doute sérieux.
L’autre raison d’une telle action revenait à une chose. Les capacités de la Capitaine. Neutraliser une cible sans la tuer, et donc permettre à l’interrogation de suivre, était sa spécialité et elle comptait bien dessus pour avoir le fin mot de cet histoire.
Au final, son pressentiment lui avait permis de ne pas être entièrement prise par surprise. Il serait bien idiot de perdre du temps ?

Pas une parole de plus ne fut prononcée. A peine son Shikai libéré, elle se mit en mouvement, se précipitant d’un Shunpô aux côtés des individus. Y aller à un contre six pouvait être bien présomptueux, mais le Haori sur ses épaules démontrait qu’elle n’était pas non plus une simple Shinigami et la confiance en ses compétences était bien présente.
Limite si elle ne pensait pas avoir plus de risque d’être prise dans l’un des Kidō de son alliée, surtout si les rapports étaient bien fidèles à la réalité. Vu son attitude jusque là, il n’était pas bien difficile pour affirmer que voir une supérieure passer à l’action serait largement suffisant pour l’y inviter également.

>> Musō no Hitotachi.

Ses lèvres laissèrent échapper de nouvelles paroles alors que son pied n’était pas encore posé sur le toit à leur côté. Suivirent neuf entailles données avec son sabre, non pas sous sa forme physique mais électrique. Nulle blessure directe n’était recherchée ainsi, simplement la neutralisation en son sens le plus pur.
Alors que les traits générés par ses frappes subsistèrent un bref instant, celles-ci explosèrent une colonne électrique s’élevant dans les cieux. Il était maintenant clair qu’il n’était plus l’heure de la discrétion.

La question de la Commandante en Second reste en suspens. Tout comme Nozomi près d'elle, elle les a vues - six silhouettes se détachant sur le ciel nocturne. S'il est impossible de discerner leurs traits, leur tenue noire et leur Zanpakutō sont en revanche bien visibles... Des ennemis? Ou bien des troupes du Capitaine Igarashi? Yoru prend un instant pour étudier la question. Dans le second cas de figure, se montrer belliqueuse sans chercher plus loin pourrait lui valoir les foudres des deux gradés l'accompagnant. Elle se rappelle encore très bien de ce qui lui a coûté tant d'années de sa mort cloîtrée derrière une lourde grille.

Son premier réflexe est de tenter une nouvelle communication avec le Capitaine de la Deuxième Division, les symboles étant encore tracés sur ses bras. Elle l'avait bien ressenti, mais elle en est désormais certaine : quelque chose brouille le flux de reishi, réduisant cet effort à néant. L'instant suivant, son équipière du jour donne le signal du départ en déscellant sa propre lame spirituelle. Bon, y a plus qu'à...

Priorité absolue : éviter de perdre bêtement la Capitaine. Comme le craignait Yoru, celle-ci représente une cible de choix pour quiconque cherche à porter atteinte à la noblesse ! Alors que Nozomi disparaît en un éclair (c'est le cas de le dire), la Nécromancienne en profite donc pour lui glisser un kekkai défensif de son cru - invisible, mais pas inactif, il formerait un bouclier capable de la protéger si une attaque venait à se glisser sous sa garde.

Puis elle se met elle-même en mouvement, s'élevant au-dessus du sol aussi vite qu'elle le peut. Pour la mise en place du spectacle son et lumière, c'est raté : Nozomi a pris les devants, et la colonne d'énergie générée par l'attaque de la Capitaine n'a strictement rien à envier à celle que créerait son propre Shakkahô. Du reste, pas de temps à perdre pour faire dans le pyrotechnique - si leurs adversaires (?) sont aussi vifs que le suggère leur uniforme, tirer bêtement dans le tas ne ferait que créer une confusion inutile, parmi les flammes et la fumée.

C'est donc un triangle d'énergie jaune qui jaillit de ses deux paumes levées.


- Shitotsu Sansen !


Prononcé à retardement, le nom du sort vient renforcer son effet - pas autant que l'aurait fait la formule complète, mais c'est avant tout la rapidité d'exécution que vient chercher la Commandante en second. Déjà occupé avec la frappe électrique de la Capitaine, l'un des intrus se trouve violemment fauché par le projectile, qui le traîne en arrière sur plusieurs mètres avant de l'épingler sur la surface pentue d'un autre toit.

Pour faire bonne mesure, c'est la Nécromancienne elle-même qui surgit à la suite, sasumata en avant, et les lames du bident se fichent de part et d'autre du cou de sa victime, faisant jaillir des éclats de tuiles sous l'impact. En tenir un seul en respect sera plus simple que de tenter de capturer les six - Yoru n'est au fait ni de leur capacités, ni de celles de son alliée, mais elle s'attend à voir les autres types en pyjama voler au secours de leur collègue, aussi prie-t-elle pour que Nozomi soit capable de trancher dans la masse pour ne pas avoir à recourir à ses propres sorts, qu'elle sait létaux.

Presque au même moment, elle prend une grande inspiration, et hurle près de son Shikai, amplifiant sa voix au maximum...


- SIX SHINIGAMI ARMÉS. CONTACT !


L'alerte tonne au-dessus d'elle, déchirant le calme nocturne. Sans nul doute, si le Capitaine Igarashi et sa partenaire ne sont pas partis à l'autre bout du Seireitei, l'information leur parviendra aussi aux oreilles : après tout, maintenant que la discrétion n'est plus de mise, plus de raison pour Yoru de ne pas réserver à son Shikai l'usage auquel il est le mieux adapté...

Alors qu'ils continuaient d'avancer, aussi bien physiquement que dans leur réflexion, les ténèbres s'étaient abattues sur eux - des ténèbres surnaturelles, s'ajoutant à celles de la nuit. Qu'ils aient ou non été sur la bonne voie, tout portait à croire qu'ils avaient bel et bien trouvé quelque chose - ou quelqu'un, plutôt. Aussitôt sur le qui-vive, Sora se retourna vivement dans la direction du responsable alors que son rire emplissait la ruelle. Une provocation supplémentaire, au cas où oser exercer son pouvoir sur eux n'aurait pas suffi.

À l'exact même moment, une voix tonitruante résonna dans les airs à travers tout le quartier ; peut-être même à travers toute le Seireitei encore endormi. Et cette voix, c'était celle - aisément reconnaissable car insupportable - de la Commande en Second Yane, signalant que la Capitaine du Kyūbantai et elle faisaient également l'objet d'une attaque par six individus armés.
Six ?
S'il avait été le premier à émettre l'idée que le coupable n'avait pas agi en solitaire, il était loin de soupçonner qu'ils puissent avoir affaire à un tel effectif. C'était un complot, il n'y avait pas d'autre mot. Que leurs deux groupes soient pris d'assaut de manière simultanée ne faisait que le confirmer.
Et s'il ne remettait pas en cause le fait que les deux femmes aient mérité leurs galons - au moins en terme de puissance concernant l'ex-détenue -, se retrouver prises en embuscade par six adversaires pouvait s'avérer délicat.
De toute manière, il n'était plus question de furtivité : ceux qui n'avaient pas déjà été réveillés par les cris le seraient par les bruits du combat, inévitable désormais. Non, à présent, ce qu'il fallait, c'était ne leur laisser aucune chance de s'échapper - et en finir rapidement pour limiter les dégâts. Puis, si besoin est, d'aller aider leurs alliées.
Ça lui convenait.

▬ Recule, intima-t-il à la Troisième Siège, brandissant son Shikai déjà libéré. Qu'elle prenne part au combat si elle le désirait, il n'irait pas l'en empêcher, mais qu'elle ne reste pas collée à lui, ou elle risquerait d'avoir à le regretter. Il reprit, s'adressant cette fois à l'ennemi qu'il n'avait pas quitté des yeux : Je sais pas à quoi tu joues, mais t'as commis une grave erreur.

Car qui mieux que la Lumière d'entre toutes les Lumières pour repousser l'obscurité ?

BAN-KAI !

Du sol tout autour d'eux se mirent à jaillir des cloisons de pierre, des murs délimitant l'enceinte de ce que quiconque ayant un jour visité l'un d'entre eux reconnaîtrait comme un temple ; un lieu de culte, où il convenait de se prosterner en signe de respect envers la divinité qui daignait venir s'y faire honorer. En l'occurrence, l'architecture trahissait une ressemblance frappante avec le sanctuaire d'Ise, le site le plus sacré lié à cette même déité.

TENSHŌ DAIJIN !

Un autre nom d'Amaterasu, la « grande déesse impériale illuminant le ciel » ; un surnom qu'elle - ou du moins que la version d'elle qui croyait résider en son sabre - se fit forte de mériter en faisant apparaître dans les airs le soleil miniature qui accompagnait toujours cette libération, inondant les parages de ses rayons. Si ça ne suffisait pas à dissiper la faculté de leur agresseur, rien d'autre ne le pourrait.

▬ On est pas coincés avec toi. Tu es coincé avec nous... Et maintenant que t'as eu la mauvaise idée de te montrer, j'ai pas l'intention de te laisser partir.

Et encore, c'était par pure politesse qu'il incluait Shugoshin dans la formulation : il s'en serait fort bien occupé tout seul. S'il n'avait évidemment pas la possibilité d'envoyer un message à qui que ce soit dans cette situation, il avait bon espoir que l'ampleur de cette manifestation saurait renseigner l'autre équipe quant au fait qu'ils avaient aussi heurté un obstacle de leur côté... Mais pas pour longtemps.

▬ RYŪGAN ! s'exclama-t-il, un vif mouvement du curieux poignard qui lui tenait lieu d'épée servant à - semble-t-il - fracturer l'un des rayons que son astre artificiel avait déversé sur eux. Une myriade d'éclats de lumière acérés fusèrent ainsi en direction de leur cible, prenant la forme d'une énorme tête de dragon illuminée, prête à le dévorer...

Il parlerait avant de mourir, le Capitaine du Nibantai allait s'en assurer, mais il allait d'abord falloir l'attraper - et rien ne leur interdisait de le malmener. Tant qu'il respirait encore, qui irait le leur reprocher ?

Le noir absolu ou presque. Le Capitaine est toujours visible ainsi qu’un homme tout au bout de la rue. Un piège ? Il n’a pas l’air d’être là par sympathie, sinon ils ne seraient pas encerclés par les ténèbres. Les deux autres aussi ont l’air d’avoir des soucis si elle en croit les mots hurlés par la commandante en second. Akemi sort sa lame au clair et se met en garde. La Shugoshin n’est pas du genre à attaquer la première, elle préfère observer et réagir en fonction. Elle est une protectrice, un soutien de qualité, alors si le combattant du groupe lui demande de reculer, elle s’exécute. Après tout, chacun a sa façon de combattre et il est certainement plus intelligent de ne pas se trouver dans la trajectoire d’action de son allié.

Parfois, il vaut mieux rester à l’écart pour ne pas gêner que d’agir. Bankai, carrément… Après tout il faudra peut-être cela au moins pour s’en sortir. L’homme en face semble bien trop sûr de lui alors qu’il a en face de lui un Capitaine et une troisième siège. Bon certes, elle ne pèse pas lourd dans la balance, mais elle a ses propres atouts.

Pour sa part, elle n’intervient pas, elle observe la réaction de l’inconnu et se prépare à intervenir en renfort si besoin. Mais si le Capitaine souhaite régler cela seul, elle respectera son souhait.

« Eclos Shūsui... » D’une voix douce, presque un murmure, elle libère son shikai. Sa lame est toujours un katana. La différence est infime, la poignée est blanche, sans garde et ornée de dorures. Au cas où, elle est prête.

« Qu’est ce qui vous fait rire ? Vous n’auriez pas dû nous menacer. » La preuve en est, son collègue se déchaîne. « Il est encore temps de vous rendre ! Arrêtez cela et présentez vous ! En tant que Troisième siège de la Huitième division, je vous l’ordonne ! »

Après tout, n’est ce pas elle qui a en charge la protection du Seireitei ? Et lui là, est un fauteur de trouble avéré.

Son regard glissa un instant sur le malheureux. Moins réactif, moins chanceux. Le seul n’ayant réussi à esquiver, subissant également le sort de sa partenaire. Pourtant, un doute subsistait en son esprit. Une légère interrogation.
Pourquoi était-il tombé aussi facilement ?
S’ils étaient bien les coupables, leur compétence était certaine. Et, même si elle était Capitaine, elle ne s’attendait pas à ce que cela soit aussi simple. Ses réserves d’énergie étaient-elles à ce point si faible pour qu’une seule frappe, même celle-ci, ne suffise ?
Au bien autre chose. Une idée fugace, basée sur un seul fait. La certitude qu’ils ne souhaitaient probablement pas de témoin. Peu importe le camp.

Cette possibilité toujours présente dans un coin de son esprit, son attention se porta un peu plus sur le reste du groupe. Et, plus principalement, sur celui qui s’exprima. Volonté de garder le masque ? De les tromper afin de mieux agir ? Ils ne s’attendaient peut-être pas à une réaction aussi vive. Mais voilà qu’ils semblaient se présenter comme étant également à la recherche des responsables.
Il serait bien idiot de les croire sur parole. Quand bien même cela serait véridique, d’autres questions ne lui plaisant guère seraient soulevées. Et, surtout, il était impossible qu’elle baisse aussi simplement sa garde.

>> Alliés ? Je n’ai nulle connaissance de soldats déployés à nos côtés. Encore moins pour nous surveiller dans l’ombre. Ce qui ferait donc de vous une troisième faction dans ce cas. Pourquoi devrai-je alors vous accorder ainsi la confiance ?

Contrairement à eux, son arme crépitait toujours dans sa main, prête à frapper de nouveau. L’infériorité numérique ne lui faisait en rien peur, le tout était de n’en lâcher aucun des yeux.
Et, en même temps, réfléchir. Une de leurs paroles raisonnait particulièrement, pouvant donner un sens à leur présence. Pas forcément une justification valable, mais une explication.

>> J’opère sous l’autorité de la Chambre des 46 et du Gunjiseiken. Ma présence, et mon but, sont donc entièrement justifiés. Par contre, je serais bien curieuse de savoir qui est ce maître que vous protégeriez, et qui pourrait ainsi entraver une opération officielle.

Un noble, ou notable, qui impliquerait sa propre milice ne serait pas réellement surprenant. Plus d’un devait estimer que le Gotei 13 n’était pas en mesure d’assurer leur protection.
Pourtant, que cela leur plaise ou non, jusqu’à nouvel ordre c’était bien eux qui avaient autorité à agir en ce sens.

>> Si votre but est réellement la protection, il serait de bon ton de coopérer pleinement et de partager toute information que vous pourriez avoir. Cela ne ferait qu’avancer les choses.

Bien sûr, elle ne le précisa pas, mais tout refus serait perçu comme une preuve que leurs intentions n’étaient en rien louables.

"Nos alliés", hein?

L'exclamation de la silhouette masquée prend Yoru au dépourvu. En effet, pas de résistance de la part du petit groupe - ils se sont contentés d'esquiver l'assaut de la Capitaine... et, même si l'un d'entre eux s'est fait épingler par le Shitotsu Sansen, la Nécromancienne s'en est bien rendue compte : son intervention n'a connu ce succès que parce que l'attention de sa proie était reportée ailleurs, rendant la trajectoire de sa cabriole évasive facile à anticiper.

Autrement dit, deux choses : d'abord, tout ce petit monde est vraisemblablement d'un niveau très respectable, et ensuite, ils ont volontairement décidé de ne pas riposter. Erreur judiciaire, alors? Ou simple façon de leur faire baisser leur garde?

C'est Nozomi qui exprime ses doutes en premier. Son raisonnement a du sens, et tandis qu'elle parle, les méninges de la brune s'activent à toute vitesse. Non, il y a effectivement trop de trucs louches dans ce qui vient de se passer. Seule, elle se serait peut-être laissée convaincre - enfin, il faut surtout dire que seule, elle n'aurait pas mené l'assaut aussi vite. Sa situation personnelle l'incite à éviter tout quiproquo, qui pourrait signer son retour à la Prison Centrale... En revanche, si l'attitude de la Capitaine lui sert de caution, elle n'a qu'à se laisser porter. De quoi simplifier le dilemme, et l'aider à trancher.

Derrière la demande de Nozomi, elle enchérit d'un ton sec :


- D'ailleurs, depuis que vous êtes là, mon Tenteikûra ne passe plus. La coïncidence est un peu grosse, non? Qu'est-ce qui justifie à vos yeux de brouiller les communications de vos "alliées"?


Pas de bol, la brune possède d'autres façons de communiquer, comme elle l'a démontré plus tôt - et, vu le raffut provoqué par leur spectacle son et lumière, elle est confiante : même si ce n'est pas le ninja en chef et sa partenaire qui se pointeront en premier pour rééquilibrer le nombre, quelqu'un finira immanquablement par venir vérifier ce qui se passe ici. Autrement dit, cette entrevue est chronométrée. Tous l'ont sûrement compris - la question étant : en abandonnant toute discrétion, lequel des deux camps a le plus à perdre?

Tout en gardant un œil sur son prisonnier, Yoru pivote tout à fait pour faire face au reste du groupe, prenant soin de bloquer le poignet de l'inconnu sous son talon histoire d'éviter de le voir dégainer son arme : après tout, rien n'empêche l'un de ses camarades de briser le Bakudō, auquel cas seuls le poids de la Nécromancienne et la menace du sasumata autour de sa gorge le maintiendraient en place. Sa priorité reste d'assister Nozomi si nécessaire, et la laisser seule contre cinq demeure un pari risqué.

Surtout que...

Le détail la fait subitement tiquer. Voilà d'où vient sa drôle d'impression.

Ramenant une main devant le bas de son visage, comme si elle réfléchissait en attendant la réponse des zigotos en pyjama, elle dissimule en réalité la phrase qu'elle projette à l'oreille de Nozomi grâce à son contrôle du son - et qu'elle préfère éviter qu'un Shinigami indiscret puisse lire sur ses lèvres.


- Mon Kekkai sur vous a sauté. Vous êtes bien la cible.


En effet, elle ne ressent plus la présence de son sort autour de son alliée, qui semble elle-même ne pas avoir remarqué de manœuvre belliqueuse à son égard. Voilà de quoi renouveler ses soupçons.

Bon. En réalité, cible ou pas, elle n'en sait rien : si ça se trouve, Nozomi a simplement pris une contre-attaque éclair lancée par réflexe lorsqu'elle s'est précipitée. Mais admettons un instant que ce petit groupe soit bien celui qui s'en prend à la noblesse, et cette attaque envers la Capitaine pourrait avoir un tout autre sens - sans parler du danger qu'elle représente, si elle a échappé à leur vigilance à toutes deux. Qu'est-ce qui se serait passé si Nozomi avait été touchée? Sort, projectile empoisonné, qui sait? Autant être alarmiste et donner à ce Pikachu sauvage une bonne raison de se tenir prête à retourner dans les hautes herbes...

Sora n'aimait pas utiliser son Bankai. Pour être exact, Sora n'aimait pas devoir compter sur son Zanpakutō. Celui-ci ne lui avait jamais fait faux bond quand il en avait eu besoin, mais leurs relations étant ce qu'elles étaient, moins il lui devait et mieux il se portait.
Mais force était d'admettre que sa lumière était encore le meilleur moyen à sa disposition pour combattre cette obscurité. Qu'elle soit le fruit d'un pouvoir ou d'un sortilège, elle ne pourrait pas être de taille à lutter contre son sabre libéré.
C'était peut-être y aller un peu fort, oui. Mais entre la présence non-signalée d'un Shinigami - ? - dans ces parages et l'utilisation non-autorisée de ses faculté envers eux il s'estimait dans son bon droit. Si le malheureux trouvait ça disproportionné, il y réfléchirait à deux fois la prochaine fois qu'il choisirait d'approcher un Capitaine de cette manière, à supposer qu'il en ait à nouveau l'occasion.

Car à en juger par la manière dont cette seule attaque avait apparemment suffi à le terrasser, il était peu probable qu'il lui soit à nouveau donné d'importuner qui que ce soit ; Sora, en tout cas, n'avait pas l'intention de le laisser s'échapper. D'autant moins après avoir dû déployer de tels moyens pour s'assurer qu'il n'ait nulle part ou s'enfuir.
Toujours sur ses gardes, le Capitaine du Nibantai se dirigea donc vers la direction dans laquelle l'individu avait été projeté, prêt à riposter si besoin. Sous cet éclairage aveuglant, omniprésent, les chances qu'il puisse à nouveau déployer ses ténébreuses facultés étaient infimes, mais cela ne voulait pas dire qu'il n'avait pas d'autre moyen de leur nuire. Sil s'était contenté de faire le mort pour porter une attaque en traître, Sora ferait de sa comédie une réalité sans rechigner.

▬ Essaie de vérifier s'il n'a pas d'amis dans les parages, lança-t-il à Shugoshin. Je m'occupe de lui.

Lui-même pouvait difficilement se mouvoir au-delà du périmètre de son Bankai tant que celui-ci était déployé, n'ayant évidemment pas la possibilité d'emmener un temple entier ; autant donc s'assurer d'abord que tout danger était écarté, du moins jusqu'à nouvel ordre.
Se penchant sur la victime de son attaque, il l'agrippa par l'avant de son Shihakushō sans ménagement pour l'examiner de plus près, curieux de découvrir son identité - et peut-être ses motivations, s'il restait quelque chose à en tirer.